Malgré les cas de rémission, l’objectif de vaincre le virus du sida est encore loin
Spécialiste des maladies infectieuses, Nadine Atoui estime que la recherche a encore des progrès à accomplir
Pour la deuxième fois de l’histoire, une personne est en rémission du sida. Infectée par le virus, elle n’a, aujourd’hui, plus besoin de traitement pour survivre, après une transplantation de moelle osseuse. Un nouvel espoir, mais est-ce vraiment une avancée dans la lutte contre le VIH (virus de l’immunodéficience humaine) ? Nadine Atoui, praticienne dans le service des maladies infectieuses et tropicales du CHU de Montpellier, a répondu à 20 Minutes.
Le sida sera-t-il un jour soigné aussi facilement que la grippe ?
On en est très loin. Actuellement, les traitements ne permettent pas aux gens de guérir. Ils stoppent la progression du virus mais ne le tuent pas. Il faut comprendre que, si on arrête le traitement d’un malade porteur du VIH, le virus repart. Et il repart très vite : en moins de trois semaines, la charge virale est à nouveau détectable. Mais les progrès sont là. Une personne atteinte du VIH prise en charge suffisamment tôt peut désormais avoir une vie à peu près normale. Chaque année, le sida tue un million de personnes dans le monde…
Le virus tue principalement dans des pays n’ayant pas accès aux soins ou aux dépistages. Il tue également lorsqu’on le découvre trop tard, et qu’il a tellement attaqué le système immunitaire que ce n’est plus compensable par les traitements actuels. De fait, on insiste sur l’importance du dépistage, surtout chez les populations à risque, afin de traiter le virus au plus tôt. On ne sait toujours pas réparer un système immunitaire que le virus aurait trop atteint. Une deuxième personne en rémission, est-ce un signe d’espoir?
Dans le cas du premier patient en rémission (en 2012), en plus du VIH, il souffrait d’une leucémie. Il a reçu une greffe de cellules de moelle osseuse issues d’un donneur qui a une résistance naturelle à l’infection VIH (0,3% de la population mondiale) après avoir subi une chimiothérapie et une aplasie. C’est un cas très intéressant mais qui ne peut être considéré comme une avancée dans la recherche d’un traitement universel. La rémission reste une situation exceptionnelle.
Selon vous, quels sont les prochains objectifs atteignables ?
On tend vers un allégement thérapeutique, avec des médicaments moins lourds et moins toxiques ou des traitements séquentiels, n’ayant pas lieu tous les jours, pour alléger la prise en charge sans perdre en efficacité. On essaie aussi de passer de la trithérapie à la bithérapie. Enfin, il y a les recherches de vaccin, mais on ne peut pas prédire quand on en trouvera un. Propos recueillis par
Jean-Loup Delmas
«On tend vers des médicaments moins lourds et moins toxiques. »