Avec l’hypnose et le placebo, le cerveau a des idées en tête
Effet placebo et hypnose permettent de moduler la douleur ressentie
« Souvent, les gens disent : “Ta douleur, c’est dans la tête”… et c’est vrai! s’amuse Céline Melin, dentiste spécialiste de la prise en charge des douleurs chroniques avec l’hypnose. La douleur provoque vraiment un changement biologique. Et l’hypnose aussi, car l’activité augmente dans les zones du cerveau impliquées dans le contrôle endogène de la douleur.» Voilà pourquoi cette médecine alternative, qui s’appuie sur l’effet placebo, intéresse de plus en plus de chercheurs, soignants et patients. A l’heure où l’on débat de l’effet placebo de l’homéopathie et des applications larges de l’hypnose, ce double sujet sera exploré par deux intervenantes, Céline Melin et Lenaïc Monconduit, neurobiologiste, jeudi, à Clermont-Ferrand (Puyde-Dôme) dans le cadre de la Semaine du cerveau, qui a été lancée lundi.
« Il n’y a rien de magique ! »
Trop cartésien pour adhérer à l’hypnose ? Selon ses adeptes, elle convient pourtant à tout le monde. «Certains ont beaucoup de résistances, on ne peut pas utiliser la même technique pour 500 personnes, c’est au praticien de s’adapter», plaide Céline Melin. L’hypnose s’immisce même dans les blocs opératoires : certains hôpitaux l’utilisent comme méthode d’anesthésie. Mais comment se fait-il que notre cerveau, tout seul, réussisse à nous soulager? «Quand vous ressentez une douleur, votre corps est capable de balancer des morphines endogènes qui vous soulagent, l’effet peut être très puissant selon les sujets, mais cela n’a rien de magique ! » prévient Philippe Luccarini, chercheur à l’université de ClermontFerrand. «Une expérience a montré également la force de l’effet placebo sur des patients souffrant d’une algie vasculaire de la face [extrêmement douloureuse] pour laquelle nous n’avons pas de traitement, reprend le chercheur. On place des électrodes sur les têtes des deux groupes de patients, certains stimulés, d’autres non. Un patient qui faisait partie du groupe non stimulé a tout de suite été soulagé ! » Inversement, certains découvrent l’effet nocebo (l’apparition d’effets indésirables, d’origine psychologique). «Une expérience a montré que, quand on donne du sucre à des patients, mais qu’on décrit quantité d’effets secondaires, ils sont capables de développer tous ces effets négatifs», explique la neurobiologiste Lenaïc Monconduit.
Aucun doute, donc, notre cerveau détient des trésors… Sur lesquels la médecine d’aujourd’hui, mais encore davantage de demain, pourrait s’appuyer. «Finalement, l’effet placebo, c’est un peu comme pour l’hypnose, on possède dans notre cerveau des structures capables de moduler notre douleur, synthétise Lenaïc Monconduit. L’hypnose et le placebo ne vont pas remplacer tous les médicaments, mais c’est extrêmement dommage de ne pas s’en servir, car on peut augmenter leurs effets d’environ 30 %. Dans certains cas, cela permettrait même de se passer de la chimie.»
Pour le moment, des études ont prouvé l’efficacité de l’hypnose pour le traitement des douleurs aiguës et chroniques, pour les addictions aussi. Mais ses effets sur d’autres champs comme les phobies, les comportements alimentaires, la fertilité pourront à l’avenir être explorés.