Les profs stagiaires claquent la porte de l’école
Le nombre de stagiaires démissionnaires a explosé en quatre ans
Apeine entré dans le métier de professeur des écoles, Samuel s’apprête déjà à le quitter. Un cas pas franchement isolé, car le nombre de démissions d’enseignants stagiaires a triplé dans le primaire et doublé dans le secondaire en quatre ans, comme l’indique un récent rapport sénatorial sur le budget de l’Éducation nationale.
L’avenir professionnel de Samuel s’annonçait pourtant radieux. Titulaire d’un master en sociologie politique, il réussit le concours de professeur des écoles du premier coup. « J’étais ravi, car j’avais très envie de travailler au contact des enfants », raconte-t-il à 20 minutes. Mais il déchante rapidement. Affecté à la rentrée 2016 dans une école primaire à Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), le jeune homme de 27 ans est chargé d’enseigner à mi-temps dans une classe de CM2, tout en poursuivant en parallèle sa formation dans une école supérieure du professorat et de l’éducation (Espe). « Je n’avais pas été formé à la tenue de classe et je n’avais pas de tuteur. Je me suis retrouvé seul devant 25 élèves, c’était un saut dans le vide, même si j’avais bien préparé mes cours au préalable », confie-t-il. « Peutêtre mes élèves ont-ils ressenti mon stress, car ils étaient très agités », se souvient-il.
Manque de soutien
Il demande conseil à la directrice d’école. « Au lieu de m’encourager, elle m’a dit dès le premier jour que je n’étais pas fait pour ce métier et a déclaré que j’avais “une mauvaise hygiène de vie”. » Seule une conseillère de l’inspection le pousse à persévérer. Envoyé dans un autre établissement, Samuel travaille en binôme avec une autre enseignante, qui lui fait des retours plutôt positifs. Le répit est de courte durée. Affecté dans une nouvelle école, le jeune homme est convoqué au rectorat. « J’ai passé les dix pires minutes de ma vie, car l’inspectrice n’a eu de cesse de me critiquer. J’étais certes loin d’être parfait dans ma pratique, mais on ne m’a pas laissé le temps de m’améliorer », regrette-t-il. Il n’est pas retourné travailler depuis les vacances de la Toussaint. « J’ai décidé de démissionner : si j’avais continué, j’aurais pété un câble. J’avais l’impression d’être nul, malgré le fait que je me sentais bien avec les enfants », confiet-il. « Ce qui est regrettable, c’est qu’avec davantage d’aide, j’aurais persévéré jusqu’à la fin de l’année scolaire pour déterminer si j’étais vraiment fait pour ce métier ou non, déplore-t-il. La mode de la bienveillance dans l’Education nationale, je ne l’ai pas ressentie envers moi. ». Samuel attend aujourd’hui la fin de son préavis de démission pour « trouver un travail plus en rapport avec mon diplôme d’origine », annonce-t-il avec regret.