Jolie fleur empoisonneuse
« Fleur de Tonnerre » fait revivre la tueuse en série Hélène Jegado
Déborah François est à la fois humaine et glaçante, fragile et impitoyable dans Fleur de Tonnerre, premier long-métrage de fiction de la documentariste Stéphanie Pillonca. Cette dernière s’est appuyée sur un roman de Jean Teulé (Pocket) pour décrire l’itinéraire meurtrier d’Hélène Jegado, née en 1803 et guillotinée en 1852. On lui attribue au moins 25 victimes. « Le cas de cette tueuse en série pourrait exister aujourd’hui, explique la cinéaste à 20 Minutes. Rien n’est plus constant et pérenne que la condition de la femme et de l’enfant. » Gamine maltraitée par sa mère (fantastique Catherine Mouchet), la petite Hélène va se métamorphoser en empoisonneuse redoutable, tuant notamment la femme d’un séduisant employeur joué par Benjamin Biolay. « Il y a quelque chose de fascinant dans la personnalité d’Hélène comme dans ses actions, insiste Stéphanie Pillonca. En travaillant avec un psychiatre, je me suis rendu compte qu’il existe encore des criminelles comme elle et que la société ne leur vient toujours pas en aide. » Quand la jeune femme, de condition très modeste, est manipulée par un juge (Jonathan Zaccaï), on pense au Juge et l’Assassin (1976) de Bertrand Tavernier, tant elle est démunie pendant son interrogatoire. « C’est évidemment aussi une question de classe sociale, explique la cinéaste. Les choses ne se sont pas améliorées. La justice n’est pas tout à fait la même selon que l’on soit riche ou pauvre. »
Horreur et compassion Hélène parvient parfois à se faire apprécier dans les maisons dans lesquelles elle sert, mais cela ne dure jamais longtemps. « J’ai voulu aussi montrer que la folie n’est pas un phénomène constant et qu’elle connaît parfois des moments de rémission », explique la réalisatrice. Ce portrait d’une femme qui sombre sans trouver personne pour l’aider émeut par son côté inéluctable. Le spectateur est partagé entre l’horreur et la compassion. « Derrière la personne qui est amenée à commettre l’irréparable, il y a toujours une part d’humanité brisée, fracassée. Je ne pardonne pas ce qu’elle a fait, mais je tente de l’expliquer », ajoute Stéphanie Pillonca.