« Je crains que ce ne soit que le début d’une série »
Pour le responsable WWF, le braconnage menace ces mammifères
La mise à mort de Vince, le rhinocéros de 4 ans du zoo de Thoiry (Yvelines) dans la nuit de lundi à mardi, pose beaucoup de questions. Stéphane Ringuet, responsable du programme Commerce des espèces sauvage au sein de l’ONG WWF, espère que ce ne soit pas le début d’une série et fait le point sur la situation des rhinocéros. Est-ce finalement si surprenant ce qui s’est produit au zoo de Thoiry ? J’ai été très choqué en apprenant les faits. Nous avons l’habitude de faire face à ces actes criminels dans les pays de répartition naturelle des rhinocéros. En Afrique du Sud [qui abrite 80 % de la population mondiale du mammifère], trois rhinocéros disparaissent chaque jour du fait du braconnage. Mais, en Europe, dans un parc zoologique sécurisé, c’est une première. Au début des années 2010, une série de vols de cornes de rhinocéros avait été commise en Allemagne, en Italie, et en France. Mais il s’agissait de cornes volées dans des musées. A Thoiry, les braconniers ont franchi une étape supplémentaire en s’attaquant à un animal vivant. Ma crainte aujourd’hui est que cette attaque soit le début d’une série. Pourquoi les cornes de rhinocéros sont-elles si prisées ? Contrairement aux défenses d’éléphants, il n’y a pas d’ivoire dans la corne de rhinocéros. Elles sont composées de la même matière que nos cheveux ou nos ongles et n’ont en soi aucune valeur. Mais, en Chine et au Vietnam, on prête à ces cornes des vertus médicinales sans qu’il y ait un fondement scientifique derrière. Elles soigneraient les vertiges ou des problèmes respiratoires, selon les croyances les plus anciennes. D’autres, plus récentes, se sont greffées : les cornes soigneraient des cancers ou contribueraient à rajeunir le corps… Elles deviennent alors un cadeau de haute valeur dans ces pays. Comment réduire la demande de cornes de rhinocéros ? Le trafic a explosé parce que plusieurs conditions sont réunies. Les braconniers savent qu’il y a une forte récompense, sans beaucoup d’efforts à faire. Le commerce des cornes de rhinocéros est interdit, même en Chine et au Vietnam, mais les risques judiciaires encourus restent souvent assez faibles. Nous devons agir sur tous ces leviers : protection des rhinocéros, connaissance des réseaux, arsenal judiciaire plus dissuasif, sensibilisation des potentiels consommateurs.