Retourner sa veste en politique, c’est tout un art
Soutiens un jour, dissidents l’autre, les politiques n’hésitent pas à retourner leur veste
De nombreux cadres LR ont d’abord soutenu mordicus François Fillon, malgré les soupçons d’emplois fictifs pesant sur le candidat de la droite à la présidentielle, avant de le lâcher avec plus ou moins de fracas… pour finalement revenir faire campagne à ses côtés. Le retournement de veste est un classique de la vie politique, mais c’est aussi un art délicat. 20 Minutes dispense quelques conseils aux girouettes à venir.
Invoquer l’intérêt général. « Chez les hommes politiques, le sens de l’opportunité est vital. La question est de savoir jusqu’où on peut aller et quel mobile on poursuit (...). Est-ce qu’on change de pied pour maintenir sa place au chaud ou, au contraire, pour garantir l’intérêt général face aux événements? » avance Bruno Fuligni, historien et auteur de L’Art de retourner sa veste. Tout est une question de motivation. Après avoir demandé au candidat de « se sacrifier », la députée européenne Nadine Morano le soutient. Pourquoi ? « Mais vous nous emmerdez les médias, toujours à poser des questions… Je vous parle de l’intérêt de la France ! » a-t-elle lâché à « Quotidien ». Même type d’argument pour François Bayrou, lors de son ralliement à Macron. Le président du MoDem le critiquait encore quelques jours plus tôt? Peut-être, mais « jamais dans les cinquante dernières années la démocratie en France n’a connu une situation aussi décomposée ».
Ne pas retourner sa veste en solo. A plusieurs, le retournement de veste a des allures de mouvement de fond. C’est d’une même voix que le trio Xavier Bertrand – Christian Estrosi – Valérie Pécresse a lâché François Fillon, dimanche, avant de revenir (à des degrés divers) vers l’ancien Premier ministre. Mieux vaut donc se ranger derrière une entité (« les sarkozystes » ou « les juppéistes » par exemple) afin de passer inaperçu.
Eviter de changer trop de fois d’avis. Si vous multipliez les changements de pied, ça pourrait commencer à se voir. Dans le métier, on appelle ça une « Fenech ». En quelques jours, le député sarkozyste aura tenu à peu près tous les discours possibles sur François Fillon. Le 1er février, il lançait un appel pour le remplacer ; le 6 février, il affirmait : « C’est notre patron, c’est notre candidat » ; le 2 mars, le député avait prédit « une déroute parfaitement programmée » et appellait à parrainer Juppé ; le 6 mars, il avait enjoint à « parrainer Baroin », même si Fillon y allait... «Les écrits restent et laissent des traces », prévient Bruno Fuligni avant de faire référence au Dictionnaire des girouettes, publié en... 1815.