20 Minutes (Paris)

Pour les vampires et le meilleur

« Buffy contre les vampires » souffle ses 20 bougies. Pour « 20 Minutes », fans et spécialist­es posent leur regard sur une série télévisée devenue culte.

- Vincent Julé

Faites le test chez vous, évoquez « Buffy » comme l’une des séries les plus importante­s de l’histoire de la télévision, voire la meilleure, et appréciez : tout le monde lève les yeux au ciel. Pour ceux qui ne l’ont pas vue, ou mal vue, à l’époque et pour les nouvelles génération­s qui ne l’ont pas encore découverte, la série se limite en effet à son titre : « Buffy contre les vampires ». Soit un teen show avec des démons. Ce qu’elle est, et ce n’est pas un gros mot. Mais le fait même d’en parler encore, vingt ans après son lancement le 10 mars 1997 sur la chaîne américaine WB, prouve qu’elle est aussi beaucoup plus. Pour les téléspecta­teurs français, « Buffy », c’est avant tout M6, la « Trilogie du samedi », les années 1990 et des souvenirs personnels, quotidiens. « “Buffy” est une série destinée aux adolescent­s au départ, témoigne Clotilde. J’ai eu la chance de la découvrir précisémen­t dans cette période de ma vie, à 15 ans, sur une toute petite télé posée au sol. Regarder “Buffy” en 1998, c’était faire partie du clan des antisociau­x et/ou des impopulair­es. » Amandine confirme : « La série m’a permis de grandir, d’avoir du caractère et d’être celle que je suis aujourd’hui. Elle restera toujours au-dessus des autres, et c’est plus qu’une série à mes yeux. » Damien, 31 ans, a vécu son coming out en même temps que le personnage de Willow : « Grâce à elle, j’ai eu le courage de le dire à ma famille et mes amis. » Premières ruptures, entrée à la fac, décès d’un parent, homosexual­ité… Selon Jessica, la série a su traiter avec brio les différents problèmes de la vie courante. De série génération­nelle, « Buffy » est devenue culte. De l’autre côté de l’Atlantique, les critiques se posent la question : pourquoi « Buffy » est l’une des meilleures séries télé? « Les grandes séries comme les grandes idées viennent à pattes de velours, commente l’essayiste Pacôme Thiellemen­t, auteur de Pop Yoga et de Les Mêmes Yeux que Lost. Il a fallu presque quatre siècles pour Shakespear­e, donc vingt ans pour “Buffy”, ça va ! » « Lors de sa première saison, “Buffy” ne se démarquait pas forcément d’une série ado avec d e s monstres, une série séduisante, plaisante, divertissa­nte, explique-t-il. Mais elle a connu un développem­ent extraordin­aire, s’est imposée comme un modèle de série grand public. » Si « Buffy » est restée, selon lui, c’est aussi qu’elle est née d’un médium « pauvre » : le teen show. Enfin, « pauvre », dans le sens trop balisé, presque caricatura­l, et donc propice à faire sa révolution, et à donner un chefd’oeuvre. Entre les mains des fans « Buffy » est une oeuvre à double détente, de celle qui mérite plusieurs visionnage­s. Pour Pacôme Thiellemen­t, elle a inventé un langage « entre le Shakespear­e du XVIe siècle et la pop culture du XXe », fait se rencontrer le sacré et l’initiatiqu­e, envisage le féminisme non pas comme un mouvement, mais comme une question philosophi­que : « Même les personnage­s modernes d’aujourd’hui ne sont pas plus modernes que ceux de “Buffy”. » Enfin, Joss Whedon a attendu la septième saison pour dire au revoir, et non pas arrêter la série, mais la donner aux spectateur­s. Ce sont eux qui la font vivre à coups de spin-off, comics, fan fictions ou publicatio­ns universita­ires.

« Elle s’est imposée comme un modèle de série grand public. »

Pacôme Thiellemen­t, essayiste

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Sarah Michelle Gellar a interprété Buffy Anne Summers de 1997 à 2003.

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