L’Europe bien silencieuse après le référendum
L’Union, qui a tardé à dénoncer la violence policière lors du référendum, est critiquée
#ShameOnEu*. De nombreux internautes se sont indignés sur les réseaux sociaux du délai de réaction des autorités européennes après la répression policière lors du référendum d’autodétermination catalan, dimanche (au moins 92 personnes ont été blessées durant ce vote où, selon Barcelone, le oui l’a emporté à 90 %). Ce n’est en effet que lundi matin que la Commission a appelé timidement le gouvernement de Mariano Rajoy et les indépendantistes à « passer rapidement de la confrontation au dialogue », tout en dénonçant l’usage de la violence.
La question est délicate pour les institutions européennes, car « elle touche à la souveraineté espagnole en direct », explique Bruno Cautrès, chercheur au Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof). Il est donc difficile pour leurs représentants « de déclarer autre chose que le fait qu’elles ne connaissent pas d’autres interlocuteurs » que le gouvernement espagnol, et qu’elles le soutiennent. C’est d’ailleurs ce qu’a fait Emmanuel Macron, lundi, en assurant « son attachement à l’unité constitutionnelle de l’Espagne ».
Le refus de l’ingérence
Chercheuse au Centre d’études politiques de l’Europe latine (Cepel), Emmanuelle Reungoat remarque, elle, que les chefs d’Etats européens, qui se connaissent bien et entretiennent d’étroites relations, n’ont pas envie d’interférer dans la politique intérieure des autres pays. Comme ils n’ont pas envie non plus que d’autres régions demandent à leur tour leur indépendance. Or, cette conception d’une Europe d’Etats-nations « va à l’encontre du projet de construction d’une Europe de grandes régions fortes ».
Le politologue belge Hendrik Vos estime pour sa part que la retenue européenne observée jusqu’ici est liée « au fait que Mariano Rajoy est membre du Parti populaire européen (PPE), majoritaire au Parlement européen, et dont est membre le président de la Commission, Jean-Claude Juncker. Le chef du gouvernement espagnol « a fait savoir qu’aucune médiation n’était nécessaire, ce qui a pesé sur le fait que l’UE a détourné le regard », a-t-il également expliqué. « Mais maintenant, il va y avoir une pression d’Etats membres et aussi de personnalités au sein du PPE » pour qu’une médiation ait lieu. Lundi, les députés européens ont d’ailleurs décidé d’ajouter à leur ordre du jour de mercredi un débat consacré à la situation en Catalogne.
* « Honte à toi, Union européenne. »