20 Minutes (Paris)

« Bien sûr que j’ai honte »

Abdelkader Merah a pour la première fois jugé les actes de son frère

- Hélène Sergent

Que ce soit lors de sa garde à vue, de l’instructio­n, ou même depuis le début de son procès, jamais Abdelkader Merah n’avait condamné les tueries de Toulouse et de Montauban perpétrées par son frère Mohamed, en mars 2012. Mardi, pourtant, face au témoignage d’un bénévole de l’école juive Ozar-Hatorah, l’homme poursuivi pour complicité d’assassinat­s a semblé ébranlé. Quand Yacov S., lunettes carrées, barbe soigneusem­ent taillée et kippa sur la tête, s’est avancé à la barre de la cour d’assises spéciale de Paris, ses mots, son rapport à Dieu et à sa foi ont paru faire écho dans le box des accusés. Un témoignage déclencheu­r « Je suis dans un état d’émotion… Je veux m’adresser aux croyants, on est tous frères de religion, a lancé Abdelkader Merah. Je ne m’adresse pas à la cour, aux journalist­es, aux magistrats. M. Yacov S. et moi-même, on croit en Dieu et, entre croyants, je suis sincèremen­t désolé de ce qui est arrivé. C’est un mélange de honte, de tristesse, de regrets. Déjà, moi, de voir les faits de l’extérieur, je trouve que c’est insoutenab­le. Mais je vois la tristesse dans les yeux des familles. Bien sûr que je condamne les actes de mon petit frère, j’ai honte. » Une honte confessée après le long récit du témoin qui a assisté à l’assassinat de quatre personnes : Jonathan Sandler et ses deux petits garçons de 5 et 3 ans, Arié et Gabriel, puis Myriam Monsonego, 7 ans. La scène a duré trente-six secondes, mais sa violence, inouïe, reste ancrée. « Il y a une chose qui m’a frappé. Je n’ai pas vu son visage, mais je ressentais cette haine… Quand il a tiré sur ses victimes, c’étaient des exécutions, il n’a eu aucune hésitation, c’était si précis », a soufflé le témoin. Impassible­s, les proches des victimes n’ont pas réagi aux excuses d’Abdelkader Merah. Expresséme­nt adressées aux « croyants », elles ont en revanche passableme­nt excédé l’avocate générale, Naïma Rudloff : « Nous sommes dans une cour d’assises et les liens entre Mohamed et Abdelkader, ce ne sont pas des liens du sang ou des liens de religion, mais des liens juridiques ! » Des liens juridiques que la cour d’assises doit examiner jusqu’au 3 novembre. L’accusé encourt une peine de prison à perpétuité.

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Abdelkader Merah a adressé ses excuses aux seuls croyants.

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