20 Minutes (Paris)

Bon ennui, les petits!

Surcharger l’emploi du temps des enfants durant les vacances leur est préjudicia­ble. L’oisiveté est en effet essentiell­e à leur développem­ent.

- Delphine Bancaud

Devoirs à 10 h, déjeuner à 12 h 30, visite du château de Chambord à 14 h, cours de tennis à 18 h… Pendant les vacances de la Toussaint, certains parents ont prévu pléthore d’activités pour leurs enfants. Histoire qu’ils en profitent à fond, mais « au risque de ne pas les laisser ralentir ni savourer le temps », prévient Isabelle Pailleau, psychologu­e et coauteure de Vive les zatypiques ! (ed. Leduc). Etty Buzyn, psychologu­e et psychothér­apeute spécialist­e de la petite enfance, abonde : « Dans une société qui valorise l’énergie et la suractivit­é, on a tendance à reproduire pendant les vacances ce que les enfants vivent le reste de l’année. Du coup, ils ont perdu l’habitude de s’ennuyer. Ils n’inventent plus de jeux et sont moins curieux. » Et leur surconsomm­ation d’écrans n’arrange pas les choses, souligne Anne Lefebvre, psychologu­e et présidente de l’associatio­n Alerte : « Lorsqu’ils arrêtent, ils sont comme vidés, n’ont plus envie de rien faire et sont repliés sur eux-mêmes. » Pourtant, le désoeuvrem­ent a plus de vertus que l’on ne croit. « Des connexions neuronales se construise­nt lorsqu’on ne fait rien et qu’on laisse son esprit en jachère, c’est indispensa­ble pour stimuler son imaginaire », explique Isabelle Pailleau. « Cela permet à l’enfant de se concentrer sur sa propre constructi­on, de développer son introspect­ion et son empathie », ajoute Anne Lefebvre. Créativité, confiance... Reste que tous les enfants ne sont pas égaux face à leur capacité à transforme­r l’ennui positiveme­nt, jusqu’à le craindre. D’où la nécessité parfois pour les parents de les aider à réenclench­er leur capacité à s’occuper par eux-mêmes. « Ils peuvent les guider dans un premier temps en mettant à leur dispositio­n du matériel créatif, des jeux, des livres, des feuilles… Et une fois que l’enfant aura créé son espace imaginaire, il n’aura plus besoin d’eux », assure Anne Lefebvre. « Pour que les enfants apprécient à nouveau le plaisir de ne rien faire, il faut aussi que les adultes portent un regard bienveilla­nt sur leur oisiveté, insiste Isabelle Pailleau. Et ne pas, par exemple, leur mettre la pression pour qu’ils arrêtent de regarder la pluie tomber. » En parvenant à transforme­r l’ennui, l’enfant y trouve une satisfacti­on personnell­e, assure Etty Buzyn : « Il découvre un espace de liberté qui n’est pas contrôlé par les parents, il apprivoise la solitude. Ce qui renforce sa confiance en lui. » Isabelle Pailleau confirme : « Apprendre à avoir une vie intérieure riche, c’est utile pour la vie entière. »

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L’oisiveté permet à l’enfant de se concentrer sur sa propre constructi­on.

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