Le Bataclan ne sonne plus pareil
L’attentat a modifié le rapport des lecteurs de « 20 Minutes » à la salle de spectacle
Cent trente morts, dont 90 au Bataclan. Le 13 novembre 2015, le nom de la salle de spectacle du 11e arrondissement parisien devenait célèbre pour d’autres raisons que les groupes qui y faisaient étape dans leurs tournées européennes. Une chose est sûre, l’attentat qui s’y est déroulé a changé durablement la perception qu’en avaient les lecteurs de 20 Minutes. « Dédiaboliser » l’endroit C’est à cause d’un empêchement de dernière minute que Maude n’a pas assisté au concert des Eagle of Death Metal, le 13 novembre 2015. Elle y est retournée un an plus tard, « pour dédiaboliser la salle qui m’a pris mon fiancé et aussi pour voir le chanteur Damien Saez ». « Sans jeter la pierre à ceux qui s’y rendent », Laure, « par respect » après les « témoignages bouleversants » qu’elle a entendus, s’interdit d’y remettre les pieds : « Pour moi, l’endroit a reçu beaucoup trop de larmes, de sang et d’horreur pour que l’on puisse s’y amuser. Je ne trouve pas cela décent. Je sors, mais pas là-bas. » Vincent, lui, a retrouvé le chemin de la salle du 11e un peu par hasard : « Le groupe Good Charlotte fait très rarement des concerts en France. Quand j’ai vu qu’il venait pour une date à Paris, j’ai pris mon ticket sans faire attention à la salle. Quand je me suis rendu compte que c’était au Bataclan, ça m’a fait bizarre. En entrant, j’ai cherché les sorties de secours. » Le jeune homme de 21 ans reconnaît que revenir sur les lieux du drame lui a servi d’exutoire. « Après les attentats, j’avais peur à chaque concert. Dès qu’il y avait de la batterie un peu forte, je regardais autour de moi pour vérifier qu’il n’y avait rien de grave. Depuis que je suis retourné au Bataclan, je n’ai plus ce sentiment. C’est comme si je me sentais soulagé. » Un soulagement qui n’est malheureusement pas encore à la portée d’Emilie. La jeune femme a longtemps dû renoncer à aller en cours, parce que son école se trouvait dans la même rue que deux des bars visés. Celle qui, en parallèle, était hôtesse dans l’événementiel, évitait aussi le Stade de France, où elle avait un temps travaillé. « Ces lieux déclenchaient des crises d’angoisse », explique-t-elle. Et d’ajouter : « On ne peut pas laisser les attentats gouverner nos vies, ou même justifier l’intégration de l’état d’urgence dans le droit commun. Mais cette conviction est rendue difficile dans des cas particuliers, tels que le Bataclan, puisque j’y ai perdu un très cher ami. J’espère que, avec le temps, mes convictions reprendront le dessus sur mes émotions. » Lire aussi p.8.