Theresa May riposte contre Moscou après l’empoisonnement d’un espion
L’affaire Skripal ponctue dix ans de tension Londres-Moscou
Un échelon de plus dans l’escalade diplomatique. Mercredi, Theresa May a annoncé des sanctions à l’égard de la Russie. En l’occurrence, l’expulsion de 23 des 59 diplomates russes accrédités au Royaume-Uni et le gel des contacts bilatéraux avec Moscou. La Première ministre britannique a notamment indiqué qu’il n’y aurait aucun représentant diplomatique ou royal à la Coupe du monde en Russie (qui démarre le 14 juin). Lundi, la cheffe du gouvernement britannique avait clairement pointé du doigt la responsabilité de Moscou dans l’empoisonnement, le 4 mars en Angleterre, de Sergueï Skripal, un exagent double, et de sa fille, toujours dans un état critique aujourd’hui. Le ministère russe des Affaires étrangères a rapidement répliqué en accusant Londres d’avoir « fait le choix de la confrontation ». Et de menacer : « Nos mesures de riposte ne se feront pas attendre. » Le responsable presse de l’ambassade russe a pour sa part écrit sur son site Internet que « l’enquête n’[était] pas transparente, les Britanniques ne sembl[ai]ent pas enclins à coopérer ». Cette crise entre les deux pays n’est pas inédite. La mort à Londres, en 2006, de l’ancien espion russe Alexandre Litvinenko, empoisonné au polonium 210, semble avoir été le point de départ d’un refroidissement diplomatique durable. Sans parler du contexte lié à l’Otan, toujours vivement critiquée par Moscou. « La GrandeBretagne apparaît toujours comme le fidèle allié des Etats-Unis dans le cadre de l’Otan, et donc l’ennemi de la Russie », rappelle Isabelle Facon, chercheure à la Fondation pour la recherche stratégique et spécialiste de la Russie. Selon les médias russes, la fermeté de Theresa May à l’égard de Moscou ne viserait qu’à faire oublier son échec sur le Brexit. Un argument évacué par la spécialiste. De plus, l’Allemagne et la France n’ont pas hésité à se ranger derrière la Grande-Bretagne depuis lundi, faisant fi des problèmes qu’elle engendre en ayant voté le Brexit. En indiquant, lundi, que la GrandeBretagne disposait de troupes stationnées en Estonie, Theresa May a fait basculer la pression de la diplomatie au terrain militaire. Mais il est peu probable que cette crise dégénère. « Les troupes basées en Estonie sont placées sous le commandement de l’Otan, rappelle Isabelle Facon. Il faudrait donc d’abord un vote de l’Otan pour une intervention. Et nous n’en sommes pas là. » Dans l’escalade diplomatique, les deux pays sont bien conscients des risques de dérapages. « Londres et Moscou prennent en compte ces risques, estime Isabelle Facon. Ils connaissent bien la limite à ne pas franchir. »