La voie critiquée de la ferme des 1000 veaux
En Corrèze, un collectif d’éleveurs a créé un centre d’engraissement vivement critiqué
De la paille fraîche, des bâtiments agricoles semi-ouverts laissant passer la lumière du jour, des bovins loin d’être entassés dans un enclos. Sur les images du site Web de la ferme de Saint-Martial (Corrèze), tout semble baigner pour les bêtes de ce centre d’engraissement. Créée en 2016, cette ferme collective accueille les veaux de 45 exploitations voisines. C’est là, après huit mois passés avec leur mère en pâturage, et avant d’être emmenés à l’abattoir, qu’ils suivront un régime alimentaire intensif qui les fera doubler de poids. Depuis un arrêté préfectoral émis fin février, la capacité du centre a été fixée à 1000 bêtes. D’où son surnom de « ferme des 1000 veaux ». Une référence à la ferme-usine dite « des 1000 vaches » (Somme), et l’un des angles d’attaque de ses opposants. Ces derniers ont manifesté samedi à Guéret, sous l’impulsion de l’association Lumière sur les pratiques d’élevage et d’abattage (L-PEA).
Souffrance animale
Outre l’arrêté, sa présidente, Aurore Lenoir, dénonce l’engraissement intensif lui-même, « qui engendre chez les bovins des douleurs au foie, aux articulations ». Et qui « assimile toujours un peu plus la bête à une machine », déplore Laurent Pinatel, porte-parole du syndicat agricole Confédération paysanne. De même, les installations de cette taille posent des problèmes environnementaux : « D’où vient l’alimentation [maïs, céréales…]? Comment gère-t-on les effluents [fumiers, lisiers…], sources de pollution aux nitrates? » Contacté, Michel Lacrocq, président du collectif d’éleveurs à l’origine de la ferme de Saint-Martial, n’a pas répondu aux questions de 20 Minutes. Mais Etienne Gangneron, producteur laitier et vice-président de la FNSEA, a souhaité rectifier le tir. « Parler de fermeusine laisse croire qu’on intensifie la production, ce qui n’est pas le cas. » De plus, le centre « crée une valeur ajoutée sur un territoire qui en a besoin économiquement », puisque les bêtes ne sont plus exportées vers des pays comme l’Italie, spécialistes de l’engraissement. Côté environnement, les agriculteurs expliquent bannir le soja pour nourrir leurs bêtes, vantent les bienfaits de la mutualisation, « un seul tracteur, au lieu de 45 si chacun d’entre nous s’était mis à faire de l’engraissement, est utilisé », ou rappellent la fin de l’envoi de bêtes vers l’Italie. Mais la relocalisation a ses limites, tranche Aurore Lenoir : « Les veaux sont ensuite vendus à des abattoirs en Ile-et-Villaine. »