20 Minutes (Paris)

La voie critiquée de la ferme des 1000 veaux

En Corrèze, un collectif d’éleveurs a créé un centre d’engraissem­ent vivement critiqué

- Fabrice Pouliquen

De la paille fraîche, des bâtiments agricoles semi-ouverts laissant passer la lumière du jour, des bovins loin d’être entassés dans un enclos. Sur les images du site Web de la ferme de Saint-Martial (Corrèze), tout semble baigner pour les bêtes de ce centre d’engraissem­ent. Créée en 2016, cette ferme collective accueille les veaux de 45 exploitati­ons voisines. C’est là, après huit mois passés avec leur mère en pâturage, et avant d’être emmenés à l’abattoir, qu’ils suivront un régime alimentair­e intensif qui les fera doubler de poids. Depuis un arrêté préfectora­l émis fin février, la capacité du centre a été fixée à 1000 bêtes. D’où son surnom de « ferme des 1000 veaux ». Une référence à la ferme-usine dite « des 1000 vaches » (Somme), et l’un des angles d’attaque de ses opposants. Ces derniers ont manifesté samedi à Guéret, sous l’impulsion de l’associatio­n Lumière sur les pratiques d’élevage et d’abattage (L-PEA).

Souffrance animale

Outre l’arrêté, sa présidente, Aurore Lenoir, dénonce l’engraissem­ent intensif lui-même, « qui engendre chez les bovins des douleurs au foie, aux articulati­ons ». Et qui « assimile toujours un peu plus la bête à une machine », déplore Laurent Pinatel, porte-parole du syndicat agricole Confédérat­ion paysanne. De même, les installati­ons de cette taille posent des problèmes environnem­entaux : « D’où vient l’alimentati­on [maïs, céréales…]? Comment gère-t-on les effluents [fumiers, lisiers…], sources de pollution aux nitrates? » Contacté, Michel Lacrocq, président du collectif d’éleveurs à l’origine de la ferme de Saint-Martial, n’a pas répondu aux questions de 20 Minutes. Mais Etienne Gangneron, producteur laitier et vice-président de la FNSEA, a souhaité rectifier le tir. « Parler de fermeusine laisse croire qu’on intensifie la production, ce qui n’est pas le cas. » De plus, le centre « crée une valeur ajoutée sur un territoire qui en a besoin économique­ment », puisque les bêtes ne sont plus exportées vers des pays comme l’Italie, spécialist­es de l’engraissem­ent. Côté environnem­ent, les agriculteu­rs expliquent bannir le soja pour nourrir leurs bêtes, vantent les bienfaits de la mutualisat­ion, « un seul tracteur, au lieu de 45 si chacun d’entre nous s’était mis à faire de l’engraissem­ent, est utilisé », ou rappellent la fin de l’envoi de bêtes vers l’Italie. Mais la relocalisa­tion a ses limites, tranche Aurore Lenoir : « Les veaux sont ensuite vendus à des abattoirs en Ile-et-Villaine. »

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Les opposants à la ferme corrézienn­e s’inquiètent pour l’environnem­ent.

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