Le scénario d’un Brexit sans accord se dessine
Royaume-Uni Les négociations sur le Brexit achoppent toujours
Deal or no deal sur le Brexit ? A quelques mois de la sortie officielle du Royaume-Uni de l’Union européenne – prévue le 29 mars – personne ne peut répondre avec certitude à cette question. Les chefs d’Etat et de gouvernement de l’UE, qui se retrouvent ce mercredi et jeudi à Bruxelles, pourront d’ailleurs méditer sur les propos ambivalents de Donald Tusk. Dans son invitation aux 27 dirigeants, le président du Conseil européen reconnaît que l’absence d’accord est «plus probable que jamais». Mais il leur demande en même temps de rester «optimistes» et de «tout mettre en oeuvre pour parvenir au meilleur accord possible». Mais, sans accord, que se passerait-il le 29 mars au soir ? «Les contrôles douaniers seront rétablis, ce qui allongera le temps de transport des marchandises », avance Ana Boata, économiste chez Euler Hermes et auteure d’une étude sur le Brexit. Le Royaume-Uni deviendrait alors un « simple » partenaire commercial, à qui l’Union appliquerait le même traitement qu’à la Chine ou aux Etats-Unis. «Les exportations britanniques vers l’UE subiront des droits de douane de 4 à 5 % en moyenne, poursuit Ana Boata. Les prix des biens anglais importés dans l’UE vont grimper. Selon nos calculs, les entreprises anglaises risquent de perdre 30 milliards de livres sterling [34 milliards d’euros] par an. » Dans son étude, Euler Hermes considère néanmoins que le scénario le plus probable reste un «Brexit aveugle». Il s’agirait d’un accord a minima qui prolongerait la période de négociation jusqu’à fin 2020. Durant ce délai, rien ne changerait vraiment du point de vue de la circulation des personnes ou des marchandises. Les Britanniques perdraient néanmoins leur droit de vote dans les institutions européennes.
Période de transition
Quid de la question irlandaise? L’île est partagée entre la République d’Irlande, membre de l’UE, et l’Irlande du Nord, territoire britannique. Avec le Brexit, les deux territoires pourraient – en théorie – être séparés par une frontière physique. L’UE a donc proposé la création d’un «filet de sécurité » (backstop), avec des contrôles douaniers en mer d’Irlande. L’Irlande du Nord resterait temporairement dans l’union douanière. Une solution impensable pour les « Unionistes », car cela ouvrirait la porte à un rapprochement politique entre l’Irlande du Nord et l’Irlande. «Theresa May a redit lundi au Parlement qu’elle était contre le backstop… tout en disant que, si elle l’acceptait, ce ne serait que temporaire, rappelle Olivier Marty, enseignant en questions européennes à Sciences Po. A mon avis, elle continue à travailler le Parlement en vue d’obtenir une majorité pour ratifier l’accord. »
Si l’UE et le Royaume-Uni ne s’entendent pas sur ce point, c’est l’ensemble de l’accord sur le Brexit qui risque de tomber. Et il y a urgence : en tenant compte des délais de ratification, il reste un peu plus de deux mois aux deux camps pour s’entendre.