Le référendum, sujet à haut risque pour Emmanuel Macron
Le chef de l’Etat songerait à recourir au référendum pour sortir de la crise des «gilets jaunes», ce qui n’est pas sans danger
Un retour au peuple pour sortir de la crise? D’après le JDD, Emmanuel Macron envisagerait un référendum à l’issue du grand débat national pour tourner la page des «gilets jaunes» – le journal évoque le 26 mai, jour des élections européennes. « A un moment donné, je serai peut-être amené à demander à nos concitoyens [s’ils sont d’accord] sur telle ou telle chose», a indiqué le chef de l’Etat lundi lors d’une réunion publique.
« Savoir s’il faut un référendum ou une loi avant de savoir ce que l’on va faire est quand même assez baroque. On prendra la décision sur la méthode quand on saura ce que l’on va faire sur le fond », a tempéré le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, mercredi. Car cette piste, critiquée par une partie de la majorité, ne serait pas sans risque pour le président de la République. «Il ne s’agit pas d’en faire un référendum pour ou contre le président», souligne un parlementaire proche du chef de l’Etat. C’est l’argument avancé par ses détracteurs : lors d’un référendum, les électeurs répondraient moins à la question posée qu’à celui qui la pose.
Difficultés d’organisation
Pour éviter d’exposer le chef de l’Etat, le député LREM Bruno Bonnell souhaite qu’un sujet précis, et d’ordre institutionnel, soit proposé aux Français, comme «la réduction du nombre de parlementaires, une part de proportionnelle directe, le vote blanc ou obligatoire, etc. On ne mettrait pas en cause la politique du gouvernement. On proposerait aux Français de valider ou non ce qu’il ressortira du grand débat.» Toutefois, «des priorités vont émerger dans les prochaines semaines et je crains que les “gilets jaunes” et les Français souhaitent aujourd’hui davantage de justice sociale et fiscale que de l’institutionnel… »
Autre difficulté pour l’exécutif : l’organisation pratique d’une telle consultation. Le grand débat national doit s’achever le 15 mars pour une restitution prévue en avril. Les européennes ont lieu le 26 mai : le calendrier s’annonce donc serré. « Avec l’article 11 de la Constitution, il faut que la question posée lors du référendum porte sur un projet de loi présenté par le gouvernement, puis débattu à l’Assemblée nationale et au Sénat, précise Michel Lascombe, ancien professeur à Sciences po Lille. Mais ça peut aller très vite, car il n’y a pas de vote. La loi prévoit ensuite une campagne électorale de quinze jours avant le référendum.» Mais «si le gouvernement décidait de faire un référendum à choix multiples, il faudrait cependant faire un projet de loi par question».
Enfin, l’exécutif prendrait le risque de brouiller les enjeux des élections européennes, mises en avant depuis plusieurs semaines et, peut-être, favorables à la majorité. Bruno Bonnell rejoint ici l’avis de plusieurs ministres : «Je pense qu’il faut différencier les deux pour éviter une campagne gloubi-boulga. »