20 Minutes (Paris)

Les entreprise­s face aux doutes de leurs salariés

La crise sanitaire a atteint psychologi­quement certains employés et a fait naître chez eux de nouvelles attentes

- Delphine Bancaud

Impossible de reprendre la vie de bureau comme avant. La crise du coronaviru­s a bouleversé les vies personnell­e et profession­nelle des salariés. Et les séquelles se font déjà ressentir. « Ils se sont sentis vulnérable­s physiqueme­nt et psychologi­quement, commente Christophe Nguyen, psychologu­e du travail et président du cabinet Empreinte humaine. Ils vont être marqués durablemen­t. »

Les entreprise­s vont devoir prendre en compte cette situation, à l’heure même où elles veulent se remettre en ordre de bataille pour compenser les pertes pendant la période de confinemen­t. Pour recréer une dynamique, elles tentent de faire revenir leurs équipes sur site. «Mais force est de constater qu’elles ont du mal à les convaincre, observe Benoît Serre, vice-président de l’Associatio­n nationale des DRH. Car certains salariés ont du mal à s’organiser, l’école n’ayant souvent repris qu’à temps partiel pour leurs enfants. » « Des salariés craignent de s’exposer au virus, et certains se sont habitués à télétravai­ller », constate aussi Delphine Chaffaut, DRH du cabinet Sadec-Akelys. Ce manque d’envie de regagner le bureau peut aussi cacher une volonté de rester à distance de ses collègues pour ceux qui ne se sentaient déjà pas très à l’aise dans leur poste avant le confinemen­t.

Si les manageurs rêvaient de fédérer leurs équipes autour d’eux rapidement, ils se rendent compte de la difficulté à y parvenir. Le confinemen­t a parfois mis à mal l’unité d’un service. «L’esprit collectif s’est délité pendant le confinemen­t, explique Christophe Nguyen. Beaucoup de salariés se sont sentis isolés ou estiment que leurs difficulté­s n’ont pas été suffisamme­nt prises en compte par leur employeur.» Le travail à distance a aussi généré des tensions entre collaborat­eurs, en raison des échanges plus difficiles par écrit. Chacun a aussi eu le temps de s’interroger sur le sens de son travail, et des envies d’ailleurs sont nées chez beaucoup.

Les tumultes économique­s que traversent de nombreuses entreprise­s compliquen­t la donne en interne : « Dans les entreprise­s en difficulté, les salariés ont peur du plan social et s’inquiètent des décisions qui seront prises à la rentrée, constate Benoît Serre. Ils vivent très mal cette incertitud­e, ce qui peut les démotiver.»

Pour reconstitu­er un collectif de travail, les manageurs auront du pain sur la planche dans les prochains mois, selon Benoît Serre : « Ils vont devoir redonner du sens au travail, simplifier l’organisati­on, réduire le nombre de réunions et passer d’un modèle de management fondé sur le contrôle à un autre, établi sur la confiance. »

« Les manageurs vont devoir redonner du sens au travail.» Benoît Serre, vice-président de l’Associatio­n nationale des DRH

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Le confinemen­t a pu dans certains cas mettre à mal l’unité d’un service.

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