20 Minutes (Paris)

L’Etat peut-il mettre un frein à la décision de Bridgeston­e?

Le gouverneme­nt et les élus sont montés au créneau pour condamner l’annonce de la fermeture de l’usine Bridgeston­e, à Béthune

- Rachel Garrat-Valcarcel

« Trahison ». On a sorti les gros mots, du côté des élus, pour dire toute sa colère après l’annonce, mercredi, de la fermeture du site Bridgeston­e de Béthune (Pas-de-Calais). L’usine du manufactur­ier japonais, qui produit des pneus, emploie 863 salariés. Du côté du gouverneme­nt, la ministre du Travail, Elisabeth Borne, et la secrétaire d’Etat chargée de l’Industrie, Agnès PannierRun­acher, ont annoncé jeudi qu’elles se rendraient lundi sur place pour une réunion de travail avec les syndicats et les élus locaux. Mais les représenta­nts de l’Etat disposent-ils vraiment de moyens pour sauver l’usine ? «Ce n’est pas possible, explique Nadine Levratto, directrice de recherche au CNRS. La stratégie de l’entreprise ne relève que d’elle-même. Même rentable, elle en a le droit. » Plusieurs arrêts de la justice ont été rendus en ce sens. L’autorisati­on administra­tive de licencieme­nt n’existe plus depuis trentequat­re ans. L’Etat et les collectivi­tés territoria­les

« La boîte à outils n’est pas énorme, mais elle a été un peu renforcée cette année.» Xavier Timbeau, OFCE

ne peuvent donc que se borner à tenter d’atténuer le choc. «Il s’agit de négocier et d’essayer de convaincre l’entreprise», poursuit Nadine Levratto. Pourtant, quelques solutions existent. «La boîte à outils n’est pas énorme, mais elle a été un peu renforcée cette année», juge Xavier Timbeau, directeur principal de l’Observatoi­re français des conjonctur­es économique­s (OFCE). Depuis 2019, la responsabi­lité sociale des entreprise­s peut être invoquée devant la justice. Or, c’est la justice qui doit valider un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE).

«On peut aussi imaginer que, pour faire face à une chute d’activité, l’entreprise ait recours à l’activité partielle», reprend Xavier Timbeau. Il rappelle néanmoins que ce type de mesure ne peut pas être imposé par l’Etat. «Cela va quand même s’argumenter devant le juge, qui devra valider ou non le PSE», poursuit le directeur de l’OFCE. L’Etat pourra donc exercer des pressions. «Mais, face à cela, l’entreprise a des recours. Devant le juge, elle pourra toujours se prévaloir du caractère impérieux de la nécessité de la fermeture du site.»

L’Etat peut aussi tenter de trouver un repreneur, même si la reprise de l’usine Whirlpool, dans la Somme, en 2017, n’a pas rencontré le succès escompté. La possibilit­é de mettre en place un plan de revitalisa­tion (l’entreprise et les collectivi­tés mettent alors au pot pour tenter de réindustri­aliser le site) existe également. «Agnès Pannier-Runacher a dit que l’Etat allait faire du bruit pour casser la réputation de Bridgeston­e, constate Nadine Levratto. Quand on en est à faire ce type de déclaratio­n, c’est que votre marge de manoeuvre est limitée.»

 ??  ?? Le site de fabricatio­n de pneus, jeudi, où 863 salariés travaillen­t.
Le site de fabricatio­n de pneus, jeudi, où 863 salariés travaillen­t.

Newspapers in French

Newspapers from France