Après les gelées printanières, coup de chaud sur les prix?
De nombreux producteurs ont perdu une grande partie de leurs récoltes, même s’il est trop tôt pour estimer les dégâts
C’est probablement «la plus grande catastrophe agronomique de ce début de XXIe siècle », a prévenu, lundi soir, sur LCP, le ministre de l’Agriculture, Julien Denormandie. Dans des régions d’habitude épargnées (Languedoc, Var, Gard…), les gelées printanières ont ravagé les récoltes la semaine dernière : vignes, vergers, champs de céréales. Avec des températures nocturnes autour de – 3 °C, chaque nuit peut faire perdre 20 % d’une culture. « Ce sont des centaines de milliers d’ha [qui sont] impactés », a précisé le ministre. Et le redoux n’est attendu que jeudi. Une «année noire» pour les professionnels. « La viticulture et l’arboriculture de cette année sont anéanties, indique Joël Mouzin, membre du bureau de la FNSEA chargé des risques sanitaires et climatiques. Il faudra attendre fin 2022.» Il est encore trop tôt pour dresser un bilan global des pertes. Mais peut-on anticiper des conséquences pour les consommateurs avec une hausse des prix ?
Solidarité nationale
Selon les estimations, par endroits, 80 % des vignes ont été détruites. Dans d’autres, on table sur 50 % de futures récoltes mort-nées. Les viticulteurs sont donc parmi les plus touchés. Mais il faudra attendre 2022 pour savoir si les prix vont augmenter sur ce secteur. Car les vendanges auront lieu entre août et octobre prochains.
Et les fruits ? La chute de la production d’abricots, de cerises, de nectarines, de pêches s’annonce vertigineuse. « Le consommateur aura beaucoup moins accès cette année à des abricots, des cerises, certains fruits», a confirmé, lundi soir, Julien Denormandie. Et d’ajouter : « La rareté (…) sera telle que, probablement, les prix s’en feront ressentir. » Illustration avec les données de l’Agreste, le service statistique du ministère de l’Agriculture : en 2020, la production nationale d’abricots a chuté de 29%, et le prix sur un an a augmenté de 46%.
«Des secteurs pourront s’en sortir avec des quantités inférieures récoltées», tempère Joël Mouzin. Mais il y a fort à parier que, si les consommateurs ne veulent pas payer plus cher, ils se fourniront ailleurs : «On en trouvera toujours des fruits, qui vont venir de l’autre côté de l’océan», avance-t-il. Ces récoltes venues de l’étranger pourraient avoir des conséquences à plus long terme. «Est-ce que les consommateurs reviendront l’année suivante vers des produits français?, s’interroge le responsable de la FNSEA. Parfois, le malheur des uns fait le bonheur des autres…»
Les agriculteurs en appellent à la solidarité nationale, en plus des aides de l’Etat. « Même s’il y a une rareté et que c’est plus cher, acheter français, c’est de la solidarité », appelle Joël Mouzin. Le Premier ministre, Jean Castex, a pour sa part promis, samedi, « des enveloppes exceptionnelles » pour aider les agriculteurs, annonçant le déplafonnement du régime d’indemnisation des calamités agricoles.