Le désarroi sans fin des familles
Aucune preuve de la culpabilité de l’accusé n’est apparue en trois semaines
«Une histoire de morts d’enfants qu’il faut tourner dans tous les sens. » Jusqu’à n’en plus souffrir. Chantal Beining pleure doucement, mardi, quand Dominique Boh-Petit, son avocate, choisit cette formule juste pour qualifier les trois semaines du procès de Francis Heaulme. Et les trente années d’errements judiciaires sur les meurtres de Cyril et Alexandre, 8 ans, perpétrés à Montigny-lès-Metz (Moselle), en 1986. Chantal pleure. Son « Cyril ». Sa « solitude ». Son « cancer ». Son addiction au Prozac. Et surtout l’incapacité de la justice à mettre un nom dans la case coupable. Dominique Beckrich pleure, elle, Alexandre. Mais pas cette justice qui ne cesse de lui « porter l’estocade ». Car le dernier à être entré dans l’arène de Montigny s’appelle Francis Heaulme. Et parce que cette « maman » n’a jamais cru qu’il était le bon cheval. Alors, à la barre, elle dépose, au pied de cette « insupportable justice », toute la colère de l’avoir vu remplacer Patrick Dils dans le box des accusés.
« Je souhaite qu’on laisse les victimes à leur chagrin. »
Me Patrice Buisson, partie civile
Mais Dils a été innocenté en 2002. Depuis, l’histoire de morts d’enfants a tourné dans un sens. Puis dans un autre. Et encore dans un autre. Et à l’heure de plaider, les parties civiles ne savent donc plus « sur quel pied danser ». A l’image de Thierry Moser. « Tourmenté » de son propre aveu, l’avocat en est réduit à pointer du doigt les « six éléments troublants » au sujet de Francis Heaulme. Alors que ses clients, les Beckrich, ne croient pas en sa culpabilité. Patrice Buisson n’y croyait pas plus jusqu’à la veille du procès. « Mon opinion a changé », révèle l’avocat du père du petit Cyril. Aucune « preuve évidente » n’est apparue en trois semaines. Mais la probabilité que les enfants croisent, le jour du drame, un autre tueur, alors que Francis Heaulme rôdait dans les parages, lui a sauté aux yeux. « Je souhaite que la justice passe avec celui-là, plaide-t-il, fataliste, en pointant du menton le box de l’accusé. Et surtout que l’on laisse les victimes à leur chagrin. » Le verdict est attendu jeudi.