Le tragique de répétition
En l’espace de trois mois, le Royaume-Uni, figure de la coalition internationale contre Daesh, a été la cible de trois attaques terroristes.
Le pont de Westminster à Londres fin mars, la Manchester Arena il y a trois semaines et le quartier de Borough Market, toujours à Londres, il y a trois jours. Si le Royaume-Uni est confronté à une vague d’attentats sans précédent sur son sol, c’est parce qu’il est « en pointe dans la coalition internationale contre Daesh », que ce soit en Libye, en Syrie ou en Irak, rappelait à 20 Minutes, fin mai, Alain Rodier, du Centre français de recherche sur le renseignement. Et d’insister : « Il est considéré par les djihadistes comme une terre de mécréants. » Cela « remonte à la guerre en Irak de 2003. Il y a un lourd passif », a précisé au Huffington Post Mathieu Guidère, spécialiste des mouvements terroristes islamistes. Ces attaques à répétition, sans lien entre elles, sont aussi l’une des conséquences de la « globalisation du ressentiment », analyse François Burgat, directeur de recherche à l’Institut de recherches et d’études sur le monde arabe et musulman (Iremam). La technologie et le partage de l’information déplacent la colère et l’amertume de Manchester à Raqqa (Syrie) ou de Mossoul (Irak) à Londres. « L’époque où l’on pouvait lancer des bombes à des milliers de kilomètres sans se soucier des répercussions chez nous est révolue. Il n’y a pas de réservoir de sens pour chaque attaque », insiste le chercheur. Car, si ce n’est pas un hasard que le Royaume-Uni ait été de nouveau visé à quelques jours des législatives anticipées (le 8 juin), ce pays subirait aussi un phénomène d’accélération « par imitation ». Les attaques et leur traitement médiatique nourrissent le passage à l’acte rapide d’individus isolés. Avec un réseau dormant de gens qui font très attention à rester dans les limites de la légalité et vont juste donner un petit coup de main. Une méthode de préparation difficile à détecter pour les services de renseignement, notamment britanniques. C’est la signature du djihadisme moderne : des attaques peu coordonnées, spontanées, qui défient toute logique de corrélation de causes à effets instantanée. Une menace de plus en plus prégnante en Europe où « l’extrémisme, à Londres ou à Paris, profite d’un terreau de profonde injustice », affirme François Burgat.
Cette attaque est l’une des conséquences de « la globalisation du ressentiment ».
François Burgat, Iremam