20 Minutes (Rennes)

Les voisins du petit Tony poursuivis, un an après ?

Les voisins du garçonnet mort en 2016 n’avaient rien signalé

- Vincent Vantighem

Ils n’ont rien dit pour ne pas « avoir de problèmes ». Ils pourraient justement en avoir aujourd’hui pour la même raison. Selon nos informatio­ns, plusieurs voisins de Tony (3 ans), mort à Reims (Marne) le 26 novembre 2016 des suites de maltraitan­ces, pourraient faire l’objet de poursuites pénales pour non-dénonciati­on et nonassista­nce à personne en danger. C’est ce que vient de réclamer l’associatio­n Innocence en danger. Dans une requête de neuf pages envoyée le 15 novembre à la juge qui instruit le dossier et au procureur, elle demande que des poursuites soient engagées à l’encontre de trois voisins et d’une amie de la mère du garçonnet qui a succombé à de « mauvais traitement­s chroniques », selon l’autopsie. « Ces témoins se sont abstenus d’agir, dans un souci de “confort” personnel, accuse Marie Grimaud, l’avocate de l’associatio­n, dans cette requête que 20 Minutes s’est procurée. [Ils étaient] dans la capacité de faire appel à la police lors des scènes de violences dont ils étaient les témoins. »

Dilemme pour le procureur

Interrogés après la mort de Tony, les quatre particulie­rs visés l’ont d’ailleurs tous reconnu, selon leurs procès-verbaux que 20 Minutes a pu consulter. Katia L., la voisine de palier, a ainsi expliqué qu’elle avait vu les « petits bleus sur le visage » de l’enfant. Jonathan L., le voisin du dessous, a, lui, avoué qu’il avait eu « pitié » de lui, sentant qu’il était « maltraité ». Quant à sa compagne, Ousmal T., elle a bien accroché dans l’ascenseur une affiche parlant de la maltraitan­ce. Mais elle n’a jamais prévenu la police, car le beau-père de Tony, accusé d’avoir fait subir un calvaire au garçonnet, « lui semblait violent verbalemen­t et peut-être physiqueme­nt ». A la lecture de ces P.-V., Matthieu Bourrette, le procureur de Reims, ne cache pas son dilemme. « Ces gens-là ont eu l’honnêteté de témoigner et d’aider les enquêteurs dans leur travail. Et c’est pour cela qu’ils risquent aujourd’hui d’être pris dans les filets. » Le magistrat le sait. S’il engage des poursuites contre eux, il rappellera à tous les Français leur obligation de signaler les maltraitan­ces dont ils sont témoins. Mais il fera aussi peur à tous ceux qui ont tardé à réagir et les incitera, alors, à ne pas témoigner du tout. « Notre but n’est pas de punir les voisins, résume Marie Grimaud. Si des poursuites sont engagées, je serai la première à demander qu’ils soient dispensés de peine. » Ce sera à un tribunal d’en décider. Voire à une cour d’assises s’ils venaient à être jugés, conjointem­ent, avec le beau-père et la mère du petit Tony. Une éventualit­é que Matthieu Bourrette n’exclut pas. « Je prendrai ma décision dans les trois ou quatre mois. »

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Une marche en hommage à Tony, le 19 décembre 2016, à Reims.

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