« Une grandeur à restaurer, selon lui»
La spécialiste de la Russie évoque le cas Vladimir Poutine, réélu président
La passe de quatre. Sans surprise, Vladimir Poutine a conservé le pouvoir en remportant dimanche l’élection présidentielle dès le premier tour avec plus de 73 % des voix. En poste depuis le 31 décembre 1999, Vladimir Poutine enchaînera donc un quatrième mandat. Anna Colin-Lebedev, spécialiste de la Russie et maîtresse de conférences à l’université Paris-Nanterre, décrit pour 20 Minutes la méthode employée par l’ancien espion du KGB pour se maintenir à la tête du pays.
Vladimir Poutine a-t-il évolué dans sa manière de diriger la Russie depuis dix-huit ans ?
Il y a bien eu une évolution et l’on peut distinguer deux phases. Le premier Poutine, celui des années 2000, à son arrivée au pouvoir, a promis aux Russes bien-être et sécurité en échange d’un détachement des affaires politiques. Le deuxième Poutine, des années 2010, s’est affirmé progressivement. Il agit désormais dans une situation économique moins favorable et cherche à montrer que les Russes doivent être solidaires contre des ennemis qui les entourent, afin de légitimer son pouvoir. Il est hanté par l’idée d’une grandeur à restaurer. Prend-il en compte les revendications
qui montent depuis 2012 ?
Il construit un modèle d’Etat qui a des points communs avec le régime soviétique, au sens où les citoyens sont entendus par l’Etat : ils peuvent s’adresser à lui, à partir du moment où ils ne contestent pas la légitimité à gouverner de ceux qui sont en place.
Poutine aime qu’on lui demande de prendre soin de sa population. Par contre, pour ce qui est d’entendre les revendications de l’opposition libérale, Poutine a beaucoup de mal.
Ce quatrième mandat sera-t-il le dernier, puisque la Constitution russe doit l’empêcher de se représenter en 2024 ?
Tous les analystes en Russie se posent la question. Personne ne s’intéresse au résultat de cette élection-là, l’interrogation, c’est le mandat suivant. Je pense que le coup de l’échange président-Premier ministre qu’il avait réalisé avec Dimitri Medvedev ne se fera plus, ce n’était possible qu’une fois. Mais il est impossible d’anticiper son prochain mouvement.