20 Minutes (Rennes)

Municipale­s

En Corse, le vote RN peine à se faire une place au soleil

- A Marseille, Jean Saint-Marc

Non, le patronyme de Thierry Mariani n’est pas corse. L’eurodéputé le rappelle d’emblée, en décrochant son téléphone. Pour l’ancien ministre de Nicolas Sarkozy, leadeur de la Droite populaire, la Corse n’est qu’une terre de conquête comme tant d’autres : il a annoncé lundi son soutien à une vingtaine de listes. La plupart sont conduites par des candidats du Rassemblem­ent national (RN). Mais dans l’Aube, à Sète, à Carpentras ou à Ajaccio, ce sont des candidats sans étiquette. « Le RN a un gros potentiel électoral en Corse, note Thierry Mariani. Mais on a du mal à le transforme­r aux municipale­s. » Le parti de Marine Le Pen a donc décidé de soutenir sur l’île des candidats externes plutôt que des « frontistes » pur jus. Pour l’instant, un seul nom a été annoncé – et le parti a indiqué qu’il ne présentera­it pas de candidat à Bastia. « François Filoni rassemble les forces citoyennes et populaires ajaccienne­s », a lancé Marine Le Pen, ce mardi, sur Twitter. Elle «appelle à la mobilisati­on » derrière cet ancien conseiller municipal du maire sortant, l’ex-LR Laurent Marcangeli.

Le cas Filoni

Son choix fait grincer quelques dents. Comme celles de Jean-Antoine Giacomi, ancien membre du RN : «Il n’y a qu’à voir le parcours de Filoni… Candidat divers gauche, puis écologiste, opposé à Laurent Marcangeli, puis avec lui en 2015 et, là, il le retrahit de nouveau», soupire l’étudiant en droit. Il précise n’avoir «plus de fonctions dans la fédération corse du RN ». Une fédération inactive depuis la fin de la campagne pour les européenne­s, en mai 2019, et qui se recompose brutalemen­t. Marine Le Pen a annoncé la nomination d’Antoni Chareyre au poste de délégué régional. Il n’a pas répondu à nos sollicitat­ions.

François Filoni, au contraire, parle avec plaisir de ce soutien officiel du parti : «On veut rassembler le maximum de monde. Les gens du RN ne sont pas frappés d’indignité : s’ils veulent faire un bout de chemin avec des objectifs bien précis, par exemple la sécurité dans les quartiers, c’est possible.» Une réaction mesurée… et logique. Si le parti de Marine Le Pen a rassemblé 27,7 % des suffrages lors des européenne­s en 2019 et 48,52 % au second tour de la présidenti­elle en 2017, il n’a recueilli que 3,28 % des suffrages lors des élections à l’assemblée de Corse en décembre 2017. Le sociologue JeanLouis Fabiani, professeur à l’université d’Europe centrale de Budapest, tente d’expliquer ce paradoxe : «Le vote pour Marine Le Pen, en Corse, est assez abstrait, lié à une protestati­on générale. Et il faut accumuler beaucoup de capital politique et familial pour se présenter. » Le chercheur réfute l’idée que de nombreux électeurs alternerai­ent entre RN aux élections nationales et partis nationalis­tes aux élections locales, citant les études de Jérôme Fourquet. «Les élections en Corse obéissent de toute façon à des règles complèteme­nt différente­s», affirme JeanGuy Talamoni, président de l’assemblée de Corse. Et lui, qui rêve d’indépendan­ce, lâche dans un sourire «que, en termes de sociologie politique, la société corse a son autonomie ».

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La présidente du FN, ici à Ajaccio en 2017, avait pourtant obtenu 48,52 % des voix au second tour de la présidenti­elle sur l’île.

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