Une réaction nucléaire ?
Après la catastrophe de Fukushima, il y a dix ans, la France s’est dotée d’un plan pour renforcer la sûreté de ses réacteurs. Où en est-on aujourd’hui?
«On ne peut garantir qu’il n’y aura jamais d’accident grave en France.» Le 30 mars 2011, alors que les caméras du monde entier étaient braquées sur l’accident nucléaire de Fukushima Daïchi, toujours en cours au Japon, André-Claude Lacoste, président de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), le gendarme du nucléaire français, appelait à tirer toutes les leçons de la catastrophe du 11 mars dans les colonnes du Monde. Par son scénario et son ampleur, l’accident de Fukushima a rapidement poussé à une remise en cause profonde de la sûreté nucléaire au niveau mondial.
En France, un plan post-Fukushima compile toute une série de mesures demandées par l’ASN, notamment à EDF, pour renforcer la sûreté nucléaire des réacteurs. Cela passe notamment par la création des Forces d’action rapide du nucléaire. Autrement dit, «des commandos très entraînés, qui ont des moyens de franchissement et des apports en eau et en électricité qu’ils peuvent rapidement déployer sur un site nucléaire accidenté, explique Karine Herviou, directrice générale adjointe à l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire [IRSN]. Il en existe quatre en France, pleinement opérationnels depuis fin 2015 et comptant au total 300 membres.» D’autres mesures de ce plan postFukushima concernent plus directement les installations nucléaires. A commencer par la mise en place, pour chaque réacteur, d’un «noyau dur», concept développé par l’IRSN. « C’est un ensemble d’équipements, autonomes du réacteur et très robustes aux agressions extrêmes, pour assurer les fonctions vitales d’une centrale en cas d’accident très grave», poursuit Karine Herviou.
Reste à savoir où en est EDF dans la mise en oeuvre des leçons tirées de Fukushima. Dix ans après la catastrophe, Greenpeace dresse un constat sévère : «Sur 23 mesures structurantes demandées par l’ASN, seules 12 ont été mises en place sur l’ensemble du parc», constate l’ONG en s’appuyant sur un rapport commandé à l’Institut Négawatt. Pour Jean-Pierre Pervès, membre de la Société française d’énergie nucléaire (SFEN), association pronucléaire, il n’y a pas matière à scandale. « Le niveau de sûreté des réacteurs français était déjà bon avant mars 2011. Le plan post-Fukushima demande juste d’aller plus loin en prenant en compte l’inimaginable, rappelle-t-il. Et certaines mesures demandées par l’ASN entraînent des chantiers considérables.» En clair, «cela prend du temps, résume le membre de la SFEN. Encore plus quand on veut bien le faire.»
«Sur 23 mesures demandées par l’ASN, seules 12 ont été mises en place.»
Greenpeace