Triés sur le volet du Covid ?
Avec des hôpitaux qui frôlent la saturation, de plus en plus de soignants craignent de devoir faire un « choix » entre les patients.
Faudra-t-il en passer par de nouvelles mesures restrictives pour endiguer la troisième vague de Covid-19 qui déferle actuellement ? Alors que le chef de l’Etat devrait se prononcer cette semaine sur la question, nombre de soignants redoutent d’être très bientôt contraints de « trier » les patients admissibles en service de réanimation, tant la pression de l’épidémie est forte et les hôpitaux saturés, notamment en Ile-de-France.
« La pression hospitalière est de plus en plus forte et angoissante.» Benjamin Davido, infectiologue
«Ce tri concernera tous les patients, Covid et non Covid, en particulier pour l’accès des patients adultes aux soins critiques», ont indiqué dans une tribune publiée par Le Journal du dimanche 41 directeurs médicaux de crise de l’AP-HP. «L’objet de cette tribune n’est pas de faire paniquer les populations, mais d’informer sur la réalité de notre quotidien : on est aujourd’hui dans une troisième vague différente des deux précédentes, avec des patients beaucoup plus jeunes et sans comorbidités, et une maladie assez agressive, explique à 20 Minutes le Pr Elie Azoulay, chef du service de réanimation de l’hôpital Saint-Louis, à
Paris. L’idée d’avoir deux patients éligibles à la réanimation et d’en arriver à devoir faire un “tri” commandé par le seul manque de lits, les soignants en crèvent psychologiquement. » En pratique, « le tri des patients a déjà commencé en dehors des réanimations avec les déprogrammations chirurgicales massives qui ont été décrétées », souligne Benjamin Davido, infectiologue à l’hôpital Raymond-Poincaré de Garches (Hauts-de-Seine) et signataire de la tribune. Dans cet établissement, « la pression hospitalière est de plus en plus forte et extrêmement angoissante, confie le Dr Davido. Parce qu’on n’est plus dans la situation de la première vague, avec des régions épargnées qui nous envoient des soignants en renfort. Aujourd’hui, le virus est partout. »
Cette crainte des soignants, le gouvernement assure l’entendre. «Il y a une ligne rouge absolue, c’est le tri des malades», a affirmé mardi le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, sur la radio RCJ. Aussi, le président Macron pourrait rapidement annoncer un nouveau tour de vis. «Nous, soignants et signataires, ce qu’on veut, ce n’est pas un reconfinement strict, insiste le Dr Davido. On souhaite que les gens se contaminent le moins possible, quelles que soient les mesures, car force est de constater que celles qui valent aujourd’hui ne sont pas efficaces.»