20 Minutes (Strasbourg)

Un ex de la DGSE raconte la libération des otages d’Arlit

- Propos recueillis par Florence Floux

Trois ans. Jean-Marc Gadoullet, excolonel de la DGSE (Direction générale de la sécurité extérieure) et membre du Bureau des légendes, a gardé le silence pendant trois ans après la libération des derniers otages français au Niger, le 29 octobre 2013. Dans son livre Agent secret (Ed. Robert Laffont), il rompt le silence pour dénoncer « le business des otages ». Il revient sur son histoire pour 20 Minutes. Comment vous êtes-vous retrouvé mêlé à l’affaire des otages d’Arlit? En 2010, je travaillai­s sur le chantier de Sogea-Satom au Mali, pour assurer la partie sécurité en plein milieu de la zone d’action d’Aqmi. Un jour, le directeur sûreté de Vinci me dit qu’ils avaient eu la veille au soir un enlèvement sur une base d’Areva, au Niger, où travaillai­t SogeaSatom comme sous-traitant. Il me demande si j’ai des infos. J’en ai obtenu, que Vinci a transmises à l’Etat. Que se passe-t-il alors? Au bout de trois mois, toujours aucune nouvelle. Exaspéré par la situation, Vinci, qui connaît mon passé, me demande conseil. Je leur réponds que le plus simple, c’est de rencontrer Abou Zeid, l’un des chefs d’Aqmi, pour éliminer les intermédia­ires véreux. Fin novembre, j’obtiens un rendez-vous avec Abou Zeid. Le 17 décembre, je suis devant lui, dans son repaire. La première libération d’otages prévue en janvier 2011 échoue à cause de l’irruption de réseaux concurrent­s. Côté malien, il y a une obstructio­n claire. Je décide de passer par le Niger. La libération des trois premiers otages me prend plus d’un mois. Je ne les ramène pas à Bamako (Mali), mais à Niamey (Niger), qui en tire les bénéfices. Ce qui déclenche un tas de crises dans les réseaux adverses. La situation s’est compliquée après ça? J’ai dérangé des gens. J’ai été pris dans une embuscade en 2001 dans le nord de Gao (Mali), où j’aurais dû perdre la vie. Jusqu’en octobre 2013, j’ai donné la priorité à la libération des quatre derniers otages. J’ai pris des coups, je n’ai rien dit. On m’a demandé de ne jamais dire que j’avais libéré les otages. Vous savez qui est responsabl­e? Pendant trois ans, j’ai mené mon enquête. Ce sont des gens qui ne plaisanten­t pas. Le business des otages est une réalité scandaleus­e qui aurait dû perdurer si j’étais resté dans les sables de Gao. J’ai porté plainte. Les otages aussi.

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Jean-Marc Gadoullet a oeuvré à la libération d’otages français.

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