« On ne rentre pas là-dedans »
Sous tension, désertée par les bus, la cité des 3000 est marquée par les violences policières subies par Théo. Des habitants du quartier témoignent.
«On ne rentre pas là-dedans », prévient mardi matin le chauffeur du bus 617, au départ de la gare d’Aulnaysous-Bois, en Seine-Saint-Denis. « Làdedans », c’est la cité des 3000, secouée depuis trois nuits par des heurts, après des violences policières contre Théo, un jeune homme de 22 ans. Les itinéraires des bus ont depuis été modifiés pour contourner le secteur
« Un acte de barbarie »
« J’habite depuis huit mois à Montignyle-Bretonneux, explique Christiane. Mon fils, un ami de Théo, m’a dit que c’était très grave. Ce qui lui est arrivé m’a beaucoup touchée », confie-t-elle au bord des larmes. Cette aidesoignante dénonce « un acte de barbarie ». « Théo est un enfant très gentil, qui ne cherche pas les histoires, dit Christiane. Ici, les enfants se protègent entre eux. On ne viole pas les enfants à Aulnay, c’est un endroit vivable ! » Slimane, 25 ans, décrit un climat plus tendu. Cet ami de Théo estime que, pour les policiers, les regroupements de jeunes sont suspects et entraînent trop de contrôles d’identité. « Tu peux ne pas te faire contrôler pendant deux ou trois semaines. Mais ça peut aussi être deux fois par jour. Une fois, ils ont fouillé ma voiture, n’ont rien trouvé et sont repartis sans un “bonjour” ni un “merci”. Avec la police, il n’y a pas de discussion, pas de dialogue. » Oussouf, habitant de la cité de l’Europe, pense que « la suppression de la police de proximité [en 2002] a été dévastatrice. On est passé d’une police de terrain à une police d’intervention. » Cette proximité est pourtant vitale selon lui. « Nous avons besoin de policiers, d’éducateurs proches de la population, qui font de la prévention. Quand des jeunes se font contrôler plusieurs fois par jour, parfois par les mêmes policiers, le “vivre ensemble” est mis à mal. Et cette défiance entraîne mécaniquement de la méfiance. »