La contestation en marche
Quatre mois après son élection, Macron doit faire face à l’épreuve de la rue. Sa réforme du Code du travail, et notamment le barème des indemnités prud’homales en cas de licenciement abusif, est pointée du doigt.
Les opposants à la réforme du Code du travail, attendus ce mardi dans la rue, ne manqueront pas de dénoncer l’instauration d’un barème obligatoire aux prud’hommes. Ce dernier définit les montants pouvant être versés à un salarié lorsque son licenciement est reconnu « sans cause réelle ni sérieuse ». Par exemple, un salarié licencié dans ce cadre et comptant cinq ans d’ancienneté dans la société pourra obtenir entre trois et six mois de salaire brut en dommages et intérêts. Un salarié présent, lui, depuis vingt-neuf ans, ne pourra pas toucher plus de vingt mois de salaire.
Frein à l’embauche ?
Pour Muriel Pénicaud, la ministre du Travail, l’instauration d’un plancher et d’un plafond des indemnités permettra une « lisibilité en cas de licenciement », ce qui enlèvera « l’incertitude sur la rupture potentielle [du contrat de travail] », qui serait un frein à l’embauche pour les employeurs. Un argument que réfutent les opposants aux ordonnances. Selon une récente note de conjoncture de l’Insee, les deux premiers freins à l’embauche identifiés par les entreprises sont « l’incertitude liée à la situation économique » (28 %) et « l’indisponibilité d’une main-d’oeuvre compétente » (27 %). Les risques juridiques du licenciement ne sont cités que par 14 % des entreprises, et le coût du licenciement n’inquiète que 10 % d’entre elles. « Le juge disposera d’une liberté encadrée, estime Deborah David, avocate spécialisée en droit du travail au cabinet Jeantet. Il aura toute latitude – dans la fourchette du barème – pour octroyer les dommages et intérêts qu’il estimera légitimes. » La réforme pourrait également faire chuter le nombre de saisines des prud’hommes, étant donné qu’il sera désormais possible de « prévoir » le coût du contentieux. Deborah David prédit un « désengorgement des conseils de prud’hommes avec davantage de ruptures à l’amiable ». « Un salarié ne va pas aller aux prud’hommes pour toucher trois mois de salaire, sachant qu’il y a les frais d’avocat », argue quant à elle Anaïs Ferrer, responsable du service juridique de la CGT. L’instauration du barème obligatoire, combinée au raccourcissement du délai pour saisir les prud’hommes (de deux à un an), est clairement un mauvais signal pour les syndicats.