Le succès des réseaux sociaux « éthiques » et sans publicité n’est pas garanti
Des plateformes promettent l’absence de pub et d’exploitation des données
U n réseau social sans publicité, qui respecte les données personnelles des utilisateurs et sans algorithme opaque pour classer les contenus. C’est ce que promet l’application Vero, lancée en 2015 et relancée ces dernières semaines par une vaste opération de marketing. Elle n’est toutefois pas précurseure en la matière, Mastodon, concurrent de Twitter décentralisé et en open source, Ello, « l’antiFacebook », Diaspora ou Path l’ont devancée dans leur dessein de contrer les géants des réseaux sociaux.
Un succès relatif
« Les internautes sont en attente d’un plan B crédible par rapport aux plateformes incontournables, analyse Olivier Ertzscheid, chercheur en sciences de l’information et de la communication à l’université de Nantes et auteur de L’Appétit des géants : pouvoir des algorithmes, ambitions des plateformes. Le côté envahissant de la publicité et l’aspect marchand de ces produits sont moins tolérés. Il y a aujourd’hui une volonté d’aller vers quelque chose de plus social. » Un avis partagé par Paul Budnitz, l’actuel patron d’Ello, réseau minimaliste sans pub créé en 2014 : « Beaucoup de nos premiers membres se sont inscrits chez nous parce qu’ils se sentaient frustrés par la manière dont les traitaient les autres plateformes, mais aussi par les choix commerciaux qu’elles faisaient à l’époque et qu’elles continuent de faire », confiet-il à 20 Minutes.
Mais, malgré toute la volonté du monde, le succès de ce créneau « éthique » semble bien relatif. « L’argument de la gratuité pour le premier million inscrit sur Vero est plutôt malin. On sait que les alternatives aux réseaux majeurs ont besoin d’un effet de seuil. C’est-àdire atteindre très vite un volume important d’utilisateurs. Or, beaucoup se sont gaufrés rapidement », précise Olivier Ertzscheid.
A ses débuts, Ello avait atteint 5 millions de membres avec « une proportion importante de robots ou de trolls », reconnaît le site. Aujourd’hui, il revendique 2,9 millions de membres, dont 650000 particulièrement actifs. Pour Paul Budnitz, l’émergence et le succès de plateformes éthiques ne pourra se faire sans prise de conscience des utilisateurs : « C’est en acceptant de fournir leurs données gratuitement et en tolérant la pub contre un service gratuit que les internautes ont permis à Facebook de devenir ce qu’il est aujourd’hui. Facebook n’a trompé personne. »