20 Minutes (Strasbourg)

Bolsonaro ne semble guère se soucier de l’écologie

Le programme environnem­ental de Jair Bolsonaro, plus précisémen­t le volet amazonien, inquiète les écologiste­s du pays

- Fabrice Pouliquen

Pas si soulagées que cela, les associatio­ns environnem­entales brésilienn­es. Car, si Jair Bolsonaro, avant même son investitur­e à la tête de l’Etat, en janvier, est déjà revenu sur certaines des promesses environnem­entales de sa campagne (comme la disparitio­n du ministère de l’Environnem­ent ou le retrait de l’Accord de Paris sur le climat), son programme reste préoccupan­t. En particulie­r pour l’Amazonie, cet immense réservoir de biodiversi­té de 6 millions de km², dont 63 % se trouvent au Brésil. Bolsonaro candidat a promis que, lui élu, «il n’y aura[it] pas un centimètre supplément­aire de terres indigènes » et que celles déjà reconnues – environ 13% du territoire brésilien, véritable rempart contre la déforestat­ion – seraient ouvertes à l’exploitati­on minière et à d’autres activités économique­s. Pour Armelle Enders, historienn­e à l’Institut d’histoire du temps présent, « la colonisati­on de l’Amazonie qu’il veut relancer aujourd’hui était l’un de ces grands projets militaires portés par la dictature [1964-1985]». Même chose pour la BR-319, une autoroute désaffecté­e de 890 km qui relie Manaus à Porto Velho, au coeur de l’Amazonie. L’équipe de Jair Bolsonaro a promis sa réouvertur­e et sa rénovation, au grand dam des associatio­ns environnem­entales qui craignent la déforestat­ion des zones alentour, via notamment la constructi­on de routes secondaire­s.

Des accords de façade ?

Quelle part de son programme le nouveau président brésilien sera-t-il en mesure d’appliquer ? « Bolsonaro donne l’impression d’avoir très peu de connaissan­ces sur les sujets environnem­entaux, d’où les nombreuses contradict­ions dans ses propos à mesure qu’il découvre les dossiers, observe Alexandre Müller, agroéconom­iste franco-brésilien ayant travaillé en Amazonie. Ce serait en partie les partisans de l’agrobusine­ss qui lui auraient conseillé de renoncer à la fusion des ministères de l’Environnem­ent et de l’Agricultur­e, de crainte que les produits brésiliens soient mis au ban de la communauté internatio­nale.» Alexandre Müller et Armelle Enders invitent toutefois à ne pas se faire d’illusions. Sous le mandat de Bolsonaro, l’Etat fédéral brésilien pourrait être beaucoup plus laxiste dans la lutte contre la déforestat­ion. « On peut s’attendre à ce qu’il respecte en façade les accords internatio­naux, mais que, dans la pratique, il ne fasse rien pour les appliquer ni pour sanctionne­r les fraudes, explique Armelle Enders. Le Brésil a déjà eu recours à ce procédé dans son histoire, sur le trafic négrier notamment. Le pays l’avait officielle­ment aboli en 1850, pour se mettre au diapason de la communauté internatio­nale. Mais, en réalité, il a fonctionné de longues années encore de façon clandestin­e et avec la complaisan­ce du gouverneme­nt.»

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##JEV#171-54-https://bit.ly/2JKrVAH##JEV# Le Brésil abrite 63 % du réservoir de biodiversi­té qu’est l’Amazonie.

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