Le procès des dirigeants
Et si, demain, les chefs d’Etat étaient jugés pour crime contre l’humanité au regard des dégâts causés par le réchauffement climatique ? Le droit pénal international ne le permet pas encore, mais des voix appellent à des sanctions fortes.
Des citoyens pourraient saisir la CPI pour enquêter sur des écocides.
Certains souhaiteraient juger les responsables de destruction d’écosystèmes
« Emmanuel Macron, la Cour vous condamne pour crime contre l’humanité pour ne pas avoir mis en oeuvre des mesures limitant la pollution et avoir contribué au dérèglement climatique. » Cette sentence n’est à ce jour que pure fiction, mais il est possible que des dirigeants se retrouvent un jour sur le banc des accusés, jugés pour avoir pris des décisions nuisibles pour l’environnement.
Ce mardi, des associations intentent une action contre l’Etat français. Elles souhaitent, avec d’autres, que l’écocide – contraction d’écosystème et de génocide – soit reconnu en droit pénal international. Leur argument ? Les décisions des chefs d’Etat et des dirigeants de multinationale ont des conséquences à moyen et long terme sur l’environnement et vont causer la mort de millions de personnes. Mais « la Cour pénale internationale (CPI) ne peut enquêter sur les crimes contre l’environnement que s’ils ont été commis afin de faciliter un crime qui entre dans compétence de la Cour, explique Fadi El Abdallah, porte-parole de la CPI. Par exemple, si un fleuve a été délibérément pollué afin de déporter ou détruire une population. »
La destruction d’un écosystème ne correspond pas à la définition de crime contre l’humanité. Ainsi, des associations et des Etats, « notamment des pays insulaires du Pacifique, victimes du dérèglement climatique », plaident donc pour que la Cour soit compétente en matière d’écocide, note la juriste Valérie Cabanes. Il leur faudrait convaincre au moins deux tiers des Etats de la CPI pour en modifier les statuts. « C’est tout à fait envisageable », assure Corinne Lepage. L’avocate craint toutefois qu’une telle « révolution juridique » n’ait pas lieu avant « un emballement des catastrophes naturelles entraînant un grand nombre de morts ».
Dans quelques décennies, si les plaidoyers d’ONG portent leurs fruits, la CPI pourrait être saisie par des citoyens pour enquêter sur des écocides. Mais comment démontrer qu’un chef d’Etat a délibérément mis en danger la planète ? « Pour Donald Trump, c’est presque une évidence, puisqu’il a déclaré qu’il ne croyait pas au réchauffement climatique », observe la juriste Valérie Cabanes. Quant à Emmanuel Macron, son cas s’annonce plus compliqué. « Il faudrait prouver qu’il n’a pas pris les bonnes décisions quand il fallait les prendre. »