20 Minutes (Strasbourg)

« Sans remords » après le meurtre de son épouse

Jean-Paul Gouzou a abattu son exfemme pour l’empêcher de partir au Mali avec ses enfants, a-t-il avancé au premier jour de son procès

- De notre envoyée spéciale à Cahors, Béatrice Colin

Il répond de manière posée aux questions du président de la cour d’assises du Lot, à Cahors, comme s’il était détaché des faits. C’est d’ailleurs un homme « très calme (…), qui a assumé complèteme­nt son geste, sans une marque de remords» que les gendarmes ont trouvé ce matin-là, raconte à la barre un enquêteur. Depuis mercredi, JeanPaul Gouzou, un exploitant agricole à la retraite, est jugé pour l’assassinat de la mère de ses trois enfants, Djénéba Bamia.

Le 3 mars 2017 au matin, à Gorses, le sexagénair­e «a déjeuné et s’est habillé en treillis, pour le côté pratique, comme s’il partait à la chasse, reprend l’enquêteur. Il s’est positionné derrière un muret et il a attendu qu’elle coupe le moteur, puis il a tiré. » Dans l’attente de l’arrivée des gendarmes, qu’il avait appelés, Jean-Paul Gouzou avait préparé ses valises et s’était même changé. «Je savais que j’allais en prison et que je n’allais pas revenir», reconnaît sans détour l’accusé, qui s’est excusé dès le début du procès auprès de ses enfants et de la famille de Djénéba Bamia.

Djihadiste­s et excision

Elle était la femme qu’il a «le plus aimée », mais il ne supportait pas l’idée qu’elle puisse partir au Mali avec ses enfants et son nouveau compagnon. Pour empêcher ce voyage, il avait dans un premier temps saisi la justice. Débouté, il s’était tourné vers la préfecture pour obtenir une interdicti­on de sortie du territoire pour ses trois enfants. En vain. « Je pensais ne pas pouvoir faire autrement, je savais qu’ils risquaient leur vie en allant au Mali», justifie le retraité. Un pays qui, selon les témoins de la défense, présentait deux risques pour les trois enfants : celui d’être aux prises avec des groupes djihadiste­s présents dans la région, celui de voir les deux petites filles être victimes d’excision.

«La défense va essayer de légitimer les inquiétude­s du mari, celle d’une mauvaise décision prise pour de bonnes raisons, avance Anne Bouillon, l’avocate de la Fédération nationale Solidarité Femmes, partie civile dans cette affaire. Mais ce n’est pas ça le dossier,. La réalité, c’est qu’il s’agit d’un homme violent, dont sa fille aînée dit qu’il est violent. Cette violence, il l’exerce physiqueme­nt, psychologi­quement et, lorsqu’il n’obtient pas ce qu’il veut, il prend la décision de tuer.» Comme les amis de la victime, l’avocate pointe les dysfonctio­nnements des autorités, qui n’ont pas pris de mesures, malgré les alertes de la victime, ni désarmé Jean-Paul Gouzou, en 2016, alors qu’une décision judiciaire allait dans ce sens. « Il est autoritair­e, il croit avoir raison. Mais il n’est pas là pour faire un exemple des violences conjugales. Qui a été témoin des violences physiques ? D’un événement où il a tiré au sol sa femme par les pieds, on fait toute une histoire», plaide de son côté Edouard Martial, l’avocat de Jean-Paul Gouzou. Le procès se poursuit jusqu’à vendredi soir.

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L’accusé est jugé depuis mercredi devant la cour d’assises du Lot, à Cahors.

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