Malgré le succès, la version américaine est très critiquée
Le remake d’«Intouchables», «The Upside», a provoqué un tollé critique aux Etats-Unis pour les clichés que le film véhicule
Le remake d’Intouchables, The Upside, réalise un carton d’audience aux EtatsUnis, où il est sorti le 11 janvier. Mais le film s’est fait dézinguer par la critique américaine, quand Intouchables (2011) avait reçu un bon accueil par la presse française. Deux points sont soulignés : primo, le fait qu’un acteur valide, Bryan Cranston, joue le rôle principal d’un handicapé ; deuzio, les clichés racistes et le simplisme du film sur ces questions. « Suggérer, même dans une comédie grand public, que les divisions raciales peuvent être effacées par Pavarotti et un joint relève de l’âge de pierre», a ainsi écrit Cath Clarke dans Time Out. Pourquoi ces questionnements sontils passés sous les radars en France ? Lauren Lolo, militante afroféministe et coprésidente de l’association La Cité des chances, a son explication. «En France, nous sommes éduqués à être colorblind, c’est-à-dire à faire semblant de ne pas voir les couleurs.» Pour elle, ce n’est pas parce que la version française a échappé aux polémiques qu’elle n’en contenait pas, car le film américain est un calque de l’original.
Des représentations usées
La militante sort la sulfateuse à propos de la représentation des Noirs dans le film : « On en a assez de voir des rôles clichés [comme celui que joue Kevin Hart, qui reprend le rôle d’Omar Sy], à savoir jouer éternellement le personnage tout sourire et un peu simplet qui aide le Blanc à se divertir. Cette représentation a un impact sur la façon dont on nous perçoit dans la société et sur le rôle qu’on pense devoir être obligé d’occuper pour être acceptable.» Pour Margot Morisseau, de la chaîne YouTube « Vivre avec », vidéaste et militante, le choix d’un acteur valide pour jouer le rôle d’une personne handicapée est « le meilleur moyen de s’assurer que jamais une personne handicapée n’aura de rôle dans un film. Quant à l’excuse “Il n’y avait pas d’acteur handicapé connu” qui aurait amené son public voir le film, c’est le serpent qui se mord la queue.» Par ailleurs, le personnage du film n’échappe pas aux clichés sur la représentation du handicap, pour Margot Morisseau : la personne handicapée est une personne valide à qui il est arrivé un terrible accident, comme dans la majorité des films; après cet accident, elle a perdu le goût de la vie parce qu’elle ne peut « plus rien faire »; elle est très riche et l’argent n’est pas un problème, alors que la moitié des personnes handicapées vivent avec moins de 1540 € par mois.
Avec les missiles tirés par la presse américaine, ces questions vont-elles se poser en France ? Lauren Lolo ne le pense pas : «Tant que les problèmes structurels français ne seront pas réglés, il sera toujours aussi dur d’aborder ces problématiques. Cependant, les réseaux sociaux permettent quelques avancées, car plus ces questions sont soulevées par des militantes et militants, plus elles sont abordées dans les médias. »