Les «boys clubs» de journalistes influents pointés du doigt
De nombreuses victimes mettent en cause des «boys clubs» de journalistes influents
« Cool kids », « boys club »… Derrière ces anglicismes, un nom tourne en boucle depuis deux jours, la Ligue du LOL. Il s’agit d’un groupe Facebook privé d’une trentaine de journalistes et communicants influents – principalement des hommes – accusés d’avoir cyberharcelé des journalistes et blogueurs, en particulier des militantes féministes, au début des années 2010. Alors que la direction de Libération a annoncé lundi avoir mis à pied à titre conservatoire deux chefs de file de la Ligue, Vincent Glad et Alexandre Hervaud, et que le magazine Les Inrocks a annoncé la mise à pied à titre conservatoire du rédacteur en chef Web, David Doucet, en vue d’un licenciement, la notion de « boys club » semble imprégner profondément les médias parisiens. Le «boys club» naît d’une solidarité masculine très répandue outre-Atlantique qui découle directement des fraternités. Cette solidarité des mâles blancs dans les sphères de pouvoir a été largement dénoncée aux Etats-Unis. En 2018, le livre Brotopia, de la journaliste tech Emily Chang, exposait la face cachée de la Silicon Valley et sa culture sexiste. Le terme d’origine, « old boys network » (« club des vieux potes»), désigne des gens qui se sont connus pendant leurs études et qui, dans le monde du travail, se serrent les coudes.
Le sexisme est inhérent à ces réseaux. On y trouve plutôt des hommes qui se regroupent pour avoir du pouvoir. «Les blagues sexistes sont un bon moyen d’avoir une connivence entre hommes blancs », souligne Isabelle Collet, maîtresse d’enseignement et de recherche sur les questions de genre et d’éducation à l’université de Genève. Plusieurs membres de la Ligue ont d’ailleurs évoqué, comme excuse, le climat de Twitter à ses débuts. « Ça correspondait à une époque où il était de bon ton (…) de faire de l’humour noir, des blagues oppressives (…) J’ai voulu faire le malin alors qu’en fait j’étais con », a tweeté le youtubeur Guilhem Malissen.
« On est finalement plus proche des situations de cyberharcèlement où personne n’a conscience de la nocivité de ce qu’il fait parce que chacun fait une toute petite chose, relève Isabelle Collet. Mais s’ils sont dix à faire continuellement cette chose-là, ça devient monstrueux. »
« Les blagues sexistes sont un bon moyen d’avoir une connivence entre hommes blancs. » Isabelle Collet, universitaire