L’acharné Gailhaguet
Malgré les accusations d’agressions sexuelles commises dans le patinage, le président de la Fédération des sports de glace s’accroche à son poste.
« C’est l’empereur. Il peut casser un patineur en claquant des doigts. » Un parent
Jusqu’où la fuite en avant de Didier Gailhaguet le mènera-t-il? Sommé de démissionner par sa ministre de tutelle, Roxana Maracineanu, en raison «de ses responsabilités morales et personnelles» dans les affaires de violences sexuelles révélées ces derniers jours au sein de la fédération, le patron de la glace tricolore semble plutôt du genrela garde meurt, mais ne se rend pas.
«La ministre ayant annoncé qu’elle mettait en place une inspection générale, le président que je suis attendra les résultats de cette inspection avant de prendre une décision sur une démission demandée par madame la ministre », déclarait Gailhaguet mardi à la sortie du comité exécutif extraordinaire de la fédération à Paris. Motion votée à l’unanimité des 18 membres présents.
Le vieux lion, en place depuis 1998 en dehors d’un court intérim, se battra jusqu’au bout pour conserver le pouvoir. Gwendal Peizerat, champion olympique en 2002 et principal opposant, joint juste après l’allocution de Maracineanu : «Là, dans sa tête, je suis sûr qu’il se demande quelle est la prochaine pièce qu’il peut bouger sur l’échiquier pour rester aux commandes. Ça fait vingt ans qu’on croit qu’on va y arriver. Ça fait vingt ans qu’il reste en place.» Le président de la FFSG, qui n’a pas répondu à nos sollicitations, au même titre que son entourage, est décrit comme un homme séducteur, très intelligent, et diablement manipulateur quand il faut assurer sa permanence au pouvoir. « Il va dire du mal de A à B, puis la même chose de B à A, avant de les rassembler et de se poser en médiateur», souffle un ancien cadre de la fédération, fatigué par les intrigues. « Ce gars-là, quand tout va bien, il est malheureux. Il a besoin qu’il y ait des conflits, des intrigues», s’épanche Jean-Christophe Simond, l’ex-entraîneur de Sarah Abitbol.
Les anecdotes abondent. Par ici, une patineuse prometteuse mise au ban parce que le président de son club n’a pas le petit doigt sur la couture du pantalon, comme les collègues. Par là, un DTN aux reins solides qui demande à s’en aller au bout de quelques mois parce qu’il « ne supporte pas de travailler avec un président aussi autoritaire ». « Il n’accepte pas la contradiction, une fois que vous émettez une autre opinion que la sienne, c’est un fou furieux», avance l’ancienne juge MarieReine Le Gougne. Les surnoms dont l’affublent ses détracteurs sont parlants : Napoléon, Talleyrand, Tullius Detritus. «Gailhaguet, c’est l’empereur, souffle un parent d’un patineur de niveau national. Tout le monde sait qu’il peut casser un patineur en claquant des doigts.»
Au ministère, où l’on suivra la conférence de presse de Gailhaguet ce mercredi (14 h) avec attention, on s’attend à une guerre de longue haleine. Personnellement mise en cause, l’ancienne ministre des Sports Marie-George Buffet encourage son successeur à ne pas faiblir : « Il ne démissionnera jamais, il tient toute la fédération, tout le système.» Et ce, même si «l’art de gouverner consiste à ne pas laisser vieillir les hommes dans leur poste», comme disait Napoléon.