20 Minutes (Toulouse)

Les assignés à résidence trouvent le temps long

La légalité de l’extension de l’assignatio­n à résidence est discutée

- Thibaut Chevillard

Combien de temps l’Etat peut-il assigner à résidence une personne? C’est à cette question, posée par Sofiyan Ifren, condamné en 2014 pour sa participat­ion à une filière djihadiste, que le Conseil constituti­onnel doit répondre, ce jeudi. « Depuis novembre 2015, mon client a passé plus de 4 000 heures chez lui. Il ne peut sortir que pour aller pointer au commissari­at, trois fois par jour », détaille son avocat, Bruno Vinay. « Plus personne ne veut vous voir et vous ne voulez plus voir personne parce que ça peut vous porter préjudice », témoignait, en mars, Sofiyan Ifren.

Un système « bancal »

La loi du 19 décembre 2016, prorogeant l’état d’urgence pour la cinquième fois (lire en encadré), prévoit qu’une « même personne ne peut être assignée à résidence pour une durée totale équivalent à plus de douze mois ». Mais les parlementa­ires ont ajouté une dispositio­n permettant au ministre de l’Intérieur de demander au juge des référés du Conseil d’Etat de prolonger la durée de cette mesure administra­tive, s’il apporte des éléments soulignant la dangerosit­é de la personne visée. C’est ce point précis que Sofiyan Ifren et son avocat contestent. Or, il n’existe qu’une seule voie de contestati­on possible : introduire un recours devant… le juge des référés du Conseil d’État. « On demande au juge d’apprécier la légalité d’une mesure qu’il a lui-même autorisée. Le système est bancal », ironise Patrice Spinosi, avocat de la Ligue des droits de l’homme. « L’administra­tion est persuadée qu’elle permet d’éviter le passage à l’acte. Il s’agit davantage d’une mesure punitive qu’autre chose », estime Me Bruno Vinay. Traduction : l’Etat n’ayant pas pu transforme­r des soupçons en certitudes, il se vengerait de la sorte. Si l’assignatio­n à résidence de Sofiyan Ifren était levée, le trentenair­e devrait encore purger son reliquat de peine. Ce qu’il préférerai­t plutôt que de faire l’objet d’une mesure faisant peser sur lui de lourds soupçons.

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Sofiyan Ifren, en mars.

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