La gauche a la tête à l’envers
De très nombreux électeurs de Mélenchon et Hamon sont perdus avant le second tour entre Macron et Le Pen.
Un hashtag a émergé sur Twitter dès le soir du premier tour de la présidentielle : #SansMoiLe7Mai, appel des électeurs de gauche qui veulent s’abstenir au moment de choisir entre Marine Le Pen et Emmanuel Macron, le 7 mai. Notre appel à témoignages a récolté, lundi matin, un millier de réponses de la part de ces sympathisants de gauche « désespérés » par le résultat du premier tour et en pleine incertitude quant au second. « Le Pen est horrible, on le sait depuis des années, mais on aura aussi de belles surprises (et pas dans le bon sens) avec Macron… Je ne veux pas participer à cette mascarade, synthétise Aline. Donc, comme beaucoup de socialistes, je voterai blanc, mais je voterai quand même pour exprimer mon mécontentement. » Quinze ans après le 21 avril 2002 et la recommandation donnée par la gauche de faire barrage au FN de Jean-Marie Le Pen, pourquoi ce front républicain ne semble-t-il plus aussi évident à une partie des jeunes socialistes? « 25 à 30 % de l’électorat Mélenchon ne veut pas jouer le rôle du barrage républicain. Cette partie voit en Macron le représentant du capitalisme libéral. Pour elle, Macron, Le Pen, c’est bonnet blanc et blanc bonnet », estime le politologue de l’IEP de Bordeaux, Jean Petaux.
Fini le front républicain
Selon un sondage Ipsos Sopra-Steria pour Le Monde juste avant le premier tour, 51 % des électeurs de Mélenchon déclaraient qu’ils voteraient Macron face à Le Pen, 12 % indiquaient qu’ils choisiraient la cheffe du FN et 37 % disaient vouloir s’abstenir. Chez les électeurs de Hamon, ils étaient 72 % à reporter leur voix sur l’ex-banquier. « L’idée d’une coalition qui peut marginaliser le FN sur le thème du barrage républicain ne tient plus. Au contraire, les stigmatisations sur ce mode le renforcent », ajoute le politologue Olivier Rouquan. Et si, à l’exception de Benoît Hamon, les trois candidats de gauche n’ont pas donné de consigne, c’est aussi parce ces dernières ne sont plus suivies, selon Jean Petaux : « La gauche est de plus en plus libertaire, toute injonction au vote pourrait être contreproductive et alimenter la crise des institutions. »