Médicament dans dix ans
Un des bactéries utilisées pour ces traitements n’est autre qu’un membre de la famille des Escherichia coli. Des chercheurs toulousains de l’Institut de recherche en santé digestive (Inserm / INRA / Université Toulouse III – Paul Sabatier, ENVT) ont décidé de décortiquer son rôle, pour voir comment elle interagit avec les autres molécules pour calmer les douleurs. Ils ont démontré au cours de leur étude, publiée dans la revue Nature Communication, que la fameuse bactérie produit une molécule aux super pouvoirs, appelée lipopeptide, composée d’un acide gras et de deux acides aminés dont le neurotransmetteur GABA. Celle-ci a alors la capacité de traverser la barrière intestinale et d’aller en quelque sorte éteindre le feu qui anime les neurones sensitifs, à l’origine des douleurs. Mais dès qu’il n’y a plus ce lipopeptide, la bactérie perd ses super pouvoirs, comme Superman quand il tombe sur un morceau de kryptonite. Plutôt que d’utiliser l’Escherichia coli pour soigner les maux de ventre de leurs souris, les scientifiques leur ont donc prescrit des lipopeptides. Et ça a marché. « Nous avons breveté les molécules de synthèse pour envisager un traitement de la douleur. La prochaine étape est de mener une preuve de concept, en faisant une étude clinique auprès d’une soixantaine de patients. Si cela fonctionne, l’objectif est, après, de réunir des fonds pour mener de vrais essais cliniques », indique Nicolas Cénac, chercheur de l’Inserm, qui a planché sur ce projet avec le Pr Eric Oswald, membre de l’Institut de recherche en santé digestive. Si les études cliniques sont concluantes, d’ici dix ans, il y aura un nouveau médicament. Le syndrome de l’intestin irritable, une maladie chronique, touche 5 % de la population française. Il est l’une des premières causes de visite chez les gastro-entérologues.