L’ombre de Knysna plane sur le rugby français
Individualisme, manque d’amour du maillot... les mentalités changent
Des Bleus en manque de résultats, une identité de jeu inexistante, un sélectionneur critiqué, des joueurs moins impliqués… Ça ne vous rappelle rien ? Mais si, l’épisode de Knysna en Afrique du Sud, lors de la Coupe du monde de football 2010. Certes, le rugby français n’en est pas encore là, mais il fait grise mine depuis des mois avec, notamment, une tournée automnale inquiétante, soldée par trois défaites et un nul arraché face au Japon, samedi. Sur le terrain comme en dehors, les joueurs semblent perdus. L’Equipe pointait, mardi, des comportements inadaptés de certains internationaux. Le Clermontois Damian Penaud aurait ainsi agacé son monde pendant les trois semaines de préparation à Marcoussis, privilégiant sa personne à la vie du groupe, rapporte Midi olympique. Au-delà du cas du centre de 21 ans, l’arrivée des jeunes poserait quelques problèmes au sein du XV de France. « Il faut se faire à l’idée qu’il y a une nouvelle génération qui arrive et que le mode de préparation qui était le nôtre a évolué », explique l’ex-pilier du Stade Français, Sylvain Marconnet. Les mentalités ont changé et le professionnalisme a sa part de responsabilité. « Cela a sûrement accentué le côté individualiste des joueurs », note l’ancien sélectionneur, Pierre Villepreux. « Aujourd’hui, le XV de France entre dans le plan de carrière d’un joueur, pour être vu et apporter plus de valeur », ajoute Sylvain Marconnet. On a comme l’impression de revenir sept ans en arrière, lorsque le foot se posait des questions existentielles. Alors, le ballon ovale va-t-il s’arrondir ? « Il faut se souvenir de Knysna et de la génération d’enfants gâtés. Avec un changement de coach et de mentalité, les choses sont rentrées dans l’ordre. Oui, le rugby est en crise de croissance. Il faut revoir les mentalités », harangue Sylvain Marconnet. « Le rugby n’est pas en train de se “footballiser”, tempère Arnaud Seux, agent de joueurs. On a encore des rugbymen qui restent dans leur petit club. » En attendant des mesures, le phénomène s’aggrave. D’autant qu’avec le quota de Jiffs (joueurs issus des filières de formation) imposé par la Ligue nationale de rugby, les clubs changent leurs priorités dans la masse salariale. « Les équipes favorisent les jeunes talents français, reprend l’agent. Le joueur moyen étranger va avoir moins d’importance pour un club. » Ainsi, les talents de demain devraient gagner toujours plus d’argent. Et ce n’est pas forcément une bonne nouvelle.
« Aujourd’hui, le XV de France entre dans un plan de carrière, pour être vu. »
L’ex-pilier Sylvain Marconnet