La caméra qui murmure à l’oreille des délinquants
Sécurité Désormais, sur le quai de la Daurade, les personnes en infraction entendent des voix… Celles des policiers municipaux
Une voix qui vient d’en haut pour vous remettre sur le droit chemin. C’est l’étonnante expérience que vivent depuis quelques mois les Toulousains qui flânent ou festoient sur le quai de la Daurade, en bord de Garonne. Mais rien à voir avec une révélation divine. La voix est celle de la police municipale. Elle demande prosaïquement d’arrêter d’uriner, de consommer de l’alcool sur le domaine public ou de quitter l’aire de jeux. Effet garanti pour les groupes de jeunes qui décampent sans demander leur reste.
« Big Brother »
L’interpellation sort en réalité d’un haut-parleur couplé à une des nombreuses caméras de vidéoprotection. Ce dispositif date du 21 septembre 2017. Mais la mairie ne l’a pas rendu public car il est « en phase d’expé- rimentation ». C’est l’antenne toulousaine de la Ligue des droits de l’Homme (LDH) qui dévoile son existence, furieuse qu’on « monte d’un cran, de façon discrétionnaire et sans débat, dans le niveau sécuritaire, au détriment des libertés publiques ». « Quand j’ai vu passer un post sur les réseaux sociaux d’un Toulousain surpris en train de boire une bière à la Daurade, j’ai cru à une blague », reconnaît son responsable, JeanFrançois Mignard. Comme ce n’en est pas une, il demande le retrait de cette version « Big Brother » de « Surprise sur prise » (une émission de caméra cachée).
La mairie, de son côté, assume son haut-parleur. « C’est la version moderne du crieur du Moyen-Âge qui venait avec son tambour faire des annonces, explique Olivier Arsac, l’adjoint à la Sécurité. Il s’agit de petits rappels à l’ordre pour assurer la tranquillité publique, et préalable à une éventuelle intervention d’une patrouille. »
Selon l’élu, qui juge le dispositif, « à la fois rigolo et surprenant » la voix retentit en moyenne deux fois par jour. « Et trois fois sur quatre l’infraction cesse immédiatement, car l’effet de surprise rend l’avertissement efficace », précise-t-il. Du coup, la mairie étudie la possibilité d’installer d’autres haut-parleurs, sur le cours Dillon, place Saint-Pierre ou place Occitane. La voix n’a pas fini de faire parler.