Nuit-deboutistes, zadistes... nouveaux soixante-huitards ?
« Mai-68. Ils commémorent, on recommence. » Ce slogan a été tagué sur la statue de la place de la République à Paris lors de la mobilisation des fonctionnaires et des cheminots du 22 mars. Et rappelle que l’esprit contestataire de Mai-68 a essaimé dans la galaxie d’extrême gauche et dans les milieux anarchistes.
« Les nuit-deboutistes s’inscrivent dans les pas des soixante-huitards, estime le journaliste et économiste Kévin Boucaud-Victoire, auteur de La Guerre des gauches (Les Editions du Cerf). La liberté totale des prises de parole en AG et la prolifération des commissions en tous genres en 2016 rappellent le déroulement de Mai-68. La défiance à l’égard des structures politiques traditionnelles est également un héritage de 1968. »
« Arrêtons de comparer »
Pour beaucoup de sociologues, les ZAD comme à Notre- Dame- desLandes, où confluent plusieurs luttes (écologiste, anticonsumériste, antinucléaire), incarnent aussi l’esprit de Mai-68. Une bonne partie de « militants gauchistes », souvent septuagénaires aujourd’hui, « [y] sont engagés de manière significative », souligne pour sa part Isabelle Sommier, professeure de sociologie politique à l’uni- versité Paris-I. « Les zadistes veulent créer une sorte d’univers alternatif, un monde utopique. Ce à quoi nous aspirions », reconnaît Hervé Hamon, coauteur de Génération (Seuil). Le sociologue Jean-Pierre Le Goff n’est pas l’auteur de Mai 68, l’héritage impossible pour rien : « Nuit debout n’est qu’une bulle, qui a vite éclaté, une utopie caricaturale d’une société horizontale. » Point de vue que partage le chef de file de Mai-68. « Il faut arrêter de comparer, tranche Daniel Cohn-Bendit. Chaque génération a le droit à sa révolte. Plaquer un modèle historique sur une révolte, ce n’est pas voir l’actualité. »