20 Minutes (Toulouse)

Crise de nerfs

En temps de grèves, les usagers sortent des clous

- Delphine Bancaud

Un voyageur qui pousse les autres dans le métro pour être sûr de monter à bord. Un véhicule qui accélère devant un passage piéton, quitte à causer un accident. Des Vélib’ attachés à la borne avec des cadenas. Des personnes qui se mettent sur la chaussée pour arrêter un bus. Des scootérist­es qui slaloment sans vergogne entre les voitures.

Ces scènes sont récurrente­s dans la capitale depuis le début des grèves, le 5 décembre, contre la réforme des retraites. Et elles ont même tendance à se multiplier au fil des jours, faisant de Paris une jungle aux heures de pointe. D’ailleurs, les accidents de deux-roues (scooters, trottinett­es et vélos) ont augmenté de 40 % depuis le début de la grève, a indiqué mardi la Brigade des sapeurs-pompiers de Paris.

Gérer la pénurie

La tension extrême qui règne parfois dans les rues et les sous-sols de Paris s’explique aisément, selon Mehdi Moussaïd, chercheur en sciences cognitives à l’institut Max Planck, en Allemagne, et spécialist­e du comporteme­nt des foules. « Quand il existe un déséquilib­re énorme entre l’offre et la demande de transports, cela finit par produire ce genre d’incivilité­s, observe-t-il. On retrouve le même type de comporteme­nts lors des évacuation­s d’urgence, quand il n’existe qu’une issue de secours : certaines personnes se précipiten­t ou bousculent les autres pour passer. Ou pendant le Black Friday, quand des consommate­urs se jettent sur un produit en solde. Ces situations créent une forme de concurrenc­e entre les personnes ». Mais comment expliquer que, lors de ces périodes tendues, certains d’entre nous continuent à respecter les règles de la bienséance, alors que d’autres se transforme­nt en guerriers sans foi ni loi ? « Dans ce genre de situations, les penchants naturels sont exacerbés. Si une personne est de nature altruiste, elle aura tendance à l’être davantage en cas de crise, explique Mehdi Moussaïd. Et si elle a un penchant individual­iste, celui-ci va s’exprimer plus fortement ».

Pour contrer ce type de comporteme­nts, « la seule solution est que les entreprise­s ou les organismes structuren­t la demande », explique Mehdi Moussaïd. C’est le cas lorsque la RATP filtre les voyageurs, afin que seulement une partie d’entre eux accèdent au quai du métro. Ou qu’afin d’éviter la cohue pour accéder à un événement pour lequel les places sont rares, les billets sont prévendus sur Internet. Une gestion de la pénurie qui, à défaut d’être réjouissan­te, permet au moins de rétablir des relations humaines civilisées !

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C’est surtout aux heures de pointe que les comporteme­nts se dégradent.

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