20 Minutes (Toulouse)

L’exception pourrait devenir la règle antiterror­iste

Christophe Castaner songe à prolonger certaines mesures de surveillan­ce

- Hélène Sergent

« Un outil précieux », « utile » et « nécessaire ». Pour le ministre de l’intérieur, Christophe Castaner, les mesures créées en octobre 2017 par la loi antiterror­iste sont devenues indispensa­bles. Ces outils directemen­t inspirés de ceux prévus par l’état d’urgence pourraient donc être pérennisés. Parmi ces nouvelles dispositio­ns, l’une s’est plus particuliè­rement imposée au fil des mois, au grand dam de certaines associatio­ns et profession­nels du droit. Lors d’un bilan présenté mercredi devant les députés de la commission des lois, le ministre a ainsi indiqué que les mesures individuel­les de contrôle administra­tif et de surveillan­ce (« Micas ») avaient bondi de 84 % par rapport à l’année passée. Ces assignatio­ns à résidence « nouvelle formule», décidées par le ministère de l’intérieur sans interventi­on d’un juge, concernent majoritair­ement (à 57 %) des personnes sortant de prison et déjà condamnées pour des infraction­s terroriste­s.

Amnesty s’inquiète

Une logique dénoncée par l’avocat pénaliste Vincent Brengarth, qui défend des personnes faisant l’objet de ces mesures de surveillan­ce. «On présente cet outil uniquement sous l’angle de la prévention. Mais au fond, qu’est-ce qu’on leur dit ? “Même si vous avez purgé votre peine, les autorités publiques vous considèren­t toujours comme une menace”. » Comme les visites domiciliai­res (appelées « perquisiti­ons administra­tives » sous l’état d’urgence), les périmètres de protection ou la fermeture de lieux de culte, ces mesures individuel­les de surveillan­ce ont été créées en 2017 pour une durée déterminée. A l’époque, le Parlement avait décidé de les mettre en place de façon expériment­ale, jusqu’en décembre 2020.

La question de leur pérennisat­ion va donc très rapidement se poser. Une perspectiv­e qui inquiète Amnesty Internatio­nal France. « Aujourd’hui, on nous dit que ces mesures sont efficaces, mais avec quels éléments à l’appui ? On demande une évaluation indépendan­te. Et nous ne sommes pas les seuls à le demander, c’est la rapporteus­e spéciale de L’ONU qui l’a exigé dans un document publié en 2018 », souligne Anne-sophie Simpere, chargée de plaidoyer « libertés » pour l’organisati­on non gouverneme­ntale internatio­nale. Impassible face à ces critiques, Christophe Castaner devrait formuler dans les prochains mois des propositio­ns pour prolonger ces mesures de surveillan­ce.

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