«La division est ce qu’il y a de plus dangereux »
L’ancien président de la République François Hollande, qui sort un livre destiné aux jeunes, revient sur l’actualité politique et sur ses années à l’elysée.
L’ancien président a reçu 20 Minutes jeudi dans ses bureaux parisiens pour expliquer sa démarche d’auteur (lire « Le contexte »), revenir sur son quinquennat et évoquer l’actualité politique. Il a aussi répondu à trois questions de nos jeunes lecteurs.
Votre livre s’adresse aux jeunes citoyens. Louise, une de nos jeunes lectrices, demande comment réconcilier les jeunes et la politique…
Les jeunes sont parfois indifférents à la politique. La politique doit montrer qu’elle est utile, qu’elle peut changer l’ordre des choses et le destin des gens. C’est important que je leur explique ce qu’est « leur » république, car ce sont eux qui vont la faire vivre.
Que signifie « être de gauche » aujourd’hui, questionne Théo ?
C’est permettre à chacun de s’émanciper, de devenir autonome, tout en assurant la solidarité entre tous. La gauche, c’est la justice, la répartition des richesses, la protection contre les aléas de la vie.
Autre question, de Lise : quel conseil donnerait le François Hollande de 2020 à celui qui arrive à l’elysée en 2012 ?
Etre plus rapide dans certaines décisions et plus attentif à ce que les Français ressentent.
Je donnerais davantage de place au respect, à la considération, à la reconnaissance. C’est ce qui nous manque aujourd’hui.
Ce travail d’écriture vous a-t-il amené à remettre en cause certains épisodes de votre quinquennat ?
Oui, par exemple sur le 49-3 [utilisé pour faire passer les lois dites Macron puis El Khomri].
Vous déconseillez donc au chef de l’etat, Emmanuel Macron, d’utiliser le 49-3 pour sa réforme des retraites ?
Sur le fond, l’idée d’une retraite par points m’avait été proposée par certains partenaires sociaux, je ne l’avais pas retenue. Aujourd’hui, s’il y a une inquiétude, c’est parce qu’il y a une incertitude. Le principe d’universalité, comme la création d’un régime unique, suscite des craintes, car il y a des différences entre les métiers. J’avais introduit des critères de pénibilité qui ont, pour partie, été supprimés [en 2017]. Je crois que cette réforme a été mal préparée, mal conçue, mal conduite. Et par expérience, je sais qu’utiliser le 49-3 quand on a une majorité n’est pas forcément bien compris.
Votre parti, le PS, vit une traversée du désert depuis la fin de votre quinquennat. Assumez-vous une part de responsabilité ?
Ma fierté, c’est d’avoir conduit, après François Mitterrand, le Parti socialiste à gagner l’élection présidentielle. Mon regret, c’est de ne pas avoir préservé l’unité du PS. Je n’en porte pas la responsabilité, car il y a eu les frondeurs [des députés socialistes opposés à la politique du gouvernement sous Hollande]. Et la division est ce qu’il y a de plus dangereux dans la crédibilité d’une politique.
Vous évoquez dans votre ouvrage le « petit plus » qui donne envie de voter pour un candidat. Quel était le vôtre à la présidentielle ?
De m’affirmer comme un candidat normal dans une période exceptionnelle. Mon « plus », c’était mon humanité, le fait que j’avais du respect pour les citoyens.
Et quel était le « plus » d’emmanuel Macron ?
D’être jeune.
Vous vous adressez aux plus jeunes, qui n’auront pas le droit de vote avant quelques années. Cela veut-il dire que vous ne serez pas candidat en 2022, mais plutôt en 2027 ?
Et pourquoi pas en 2032 ! Soyons sérieux, même si je rappelle qu’il n’y a pas de limite d’âge pour se porter candidat. Avec ce livre, je ne cherche aucun intérêt. Les droits d’auteur seront versés à une association, Bibliothèques sans frontières. Je ne cherche pas à convaincre des jeunes d’adhérer à ma personne ou à mes idées, je veux transmettre. Propos recueillis par Delphine Bancaud, Laure Cometti et Armelle Le Goff
«La gauche, c’est la justice, la répartition des richesses. »
« Mon regret, c’est de ne pas avoir préservé l’unité du PS.» Institutions Chaque vendredi, un témoin commente un phénomène de société