Jugé pour avoir insulté Ndiaye
Un producteur de concerts toulousain comparaîtra le 9 novembre devant le tribunal correctionnel pour outrage
Souvenez-vous : le 18 mars, deuxième jour de confinement, Sibeth Ndiaye, alors porte-parole du gouvernement, déclare en conférence de presse : « Il n’y a pas lieu de porter en continu et de façon générale un masque de protection. »
A Toulouse, devant son écran, Bastien Bacha, 41 ans, tourneur et organisateur de concerts reggae et de musique du monde, n’en croit pas ses oreilles : « On aurait dit qu’elle parlait à des mômes. Elle m’a vexé, blessé, énervé.» Il a d’autant plus de mal à avaler « ces mensonges » qu’il a déjà arrêté d’organiser des concerts, « au nom du principe de précaution et pour éviter de faire prendre des risques au public », affirme-t-il.
Le 19 mars, après une nuit d’insomnie, « je me suis dit je vais la contacter ». Il va sur le moteur de recherche Wikileaks et, cinq minutes plus tard, dégote un e-mail, avec en guise de signature, le numéro de portable de Sibeth Ndiaye. Ni une, ni deux, il l’appelle. Il est 9h26. Au bout de quatre sonneries, la porte-parole du gouvernement décroche. « Ma copine qui était à côté de moi, est devenue toute blanche. Je suis parti en roue libre », se défend le Toulousain. Et voilà ce qu’il lui dit : «Sibeth, tu sais ce que c’est des courbes exponentielles ? Tu sais? Arrête de raconter n’importe quoi. Tais-toi, salope. Tais-toi, salope [en hurlant]. » Sibeth Ndiaye ne moufte pas. Il raccroche.
Il « regrette »
A 10 h 50, l’officier de sécurité de la porte-parole du gouvernement pousse la porte du commissariat du VIIE arrondissement pour déposer une plainte, au nom de Sibeth Ndiaye, pour « outrage à personne dépositaire de l’autorité publique». A midi, le substitut du procureur de Paris prend des réquisitions pour identifier le numéro de téléphone, masqué au moment de l’appel. Six jours, plus tard, Bastien Bacha est formellement identifié. Le dossier est transféré au procureur de Toulouse et suivi de très près par le ministère de l’intérieur.
Le 19 mai, la police tape à la porte de Bastien Bacha pour lui remettre en main propre une convocation pour le lendemain. Il s’y rend et là, devant les enquêteurs, « regrette d’avoir tenu des insultes à son égard» et se dit « attristé d’avoir fait perdre du temps à la police et à la justice ».
Fin août, il est convoqué par le procureur pour une procédure de plaidercoupable. On lui propose deux mois de prison avec sursis et un mois de travail d’intérêt général. Il refuse tout net. Le voilà donc prié de se présenter ce 9 novembre devant la justice. «Un dossier pareil n’aurait jamais dû aller devant le tribunal », s’agace Me Claire Dujardin, son avocate. «Il n’avait pas l’intention de faire du mal. Il n’a pas su se maîtriser, il a craqué. Nous allons demander une relaxe ou une dispense de peine », ajoute-t-elle.