Dix-huit individus jugés pour trafic d’êtres humains
Dix-huit personnes sont jugées en correctionnelle pour traite d‘êtres humains. Ils profitaient de l’exploitation de mendiants
Chaque mendiant appartenait à un clan. «On leur donnait de l’alcool et ils étaient conditionnés par la violence. Les mendiants étaient répartis sur des territoires et, à l’image du deal, les carrefours se marchandaient et les mendiants pouvaient être revendus ainsi jusqu’à 500 € », racontait un enquêteur en juin 2018. A l’époque, après plusieurs mois d’enquête, la sûreté départementale de Toulouse avait démantelé un réseau international de traite d’êtres humains organisé par des mafieux Roms bulgares.
A partir de ce lundi, et durant dix jours, dix-huit d’entre eux vont être jugés par le tribunal correctionnel de Toulouse pour traite d’êtres humains commise en bande organisée et exploitation de la mendicité forcée. Les débats, délocalisés, pour la première fois depuis le second procès AZF, dans la salle Jean-mermoz, en raison des conditions sanitaires à respecter, documentent une affaire qui a commencé par une plainte déposée en mai 2017.
Trente-trois victimes
Ce mois-là, un homme d’origine bulgare se présente au commissariat et raconte aux policiers comment un de ses compatriotes l’avait «invité», un an auparavant ,à venir en France pour faire la manche et partager les bénéfices. Mais, rapidement, l’association se transforme en exploitation, son « hôte » lui ayant confisqué ses papiers, en plus d’avoir commencé à le frapper. Et, au sein du camp de Gabardie, il n’était pas le seul à subir ce sort «d’esclave» , à vivre dans le dénuement, tyrannisé par cinq familles originaires de Pleven. Lors de leur intervention dans le camp, un matin de juin 2018, les enquêteurs trouvent 33 mendiants, parfois handicapés, la plupart ayant été attirés en France pour des prétextes fallacieux ou grâce à des promesses d’agent facile. Chacun avait des objectifs précis, les résultats étant même notés sur des feuilles, comme des livres de compte. Comme pour n’importe quel revendeur de drogue, le chef du clan les appelait régulièrement, histoire de leur rappeler leurs objectifs quotidiens. S’ils avaient le malheur de ne pas les remplir, ils étaient brutalisés. Parallèlement, sur les réseaux sociaux, les bourreaux affichaient leur «réussite» à bord de berlines de type Audi Q7, financées par l’argent gagné grâce aux mains tendues des mendiants, chaque jour, aux carrefours de Gramont ou des Ponts-jumeaux.
Lors de leurs auditions, les onze hommes et sept femmes prévenus ont nié toute responsabilité, certains évoquant la vente de ferraille pour justifier leur argent et les flux financiers. « Ceux qui disent avoir été victimes ne sont pas là et ne viendront pas, a déclaré Alexandre Martin, l’avocat de six des accusés. On va rester sur des accusations que mes clients contestent. Ce sont, eux aussi, des misérables qui ont fui la misère. La question sera de savoir s’ils ont profité de la misère d’autres. »