Pas le coeur à être confinés
Les services d’épidémiologie et de cardiologie du CHU de Toulouse ont interrogé 536 habitants de la Haute-garonne
Les dégâts cardiovasculaires et psychologiques du premier confinement ont été perceptibles au bout d’un mois et demi de privation de liberté. C’est ce qui ressort d’une étude des services d’épidémiologie et de cardiologie du CHU de Toulouse, en collaboration avec l’inserm. Elle a été publiée fin décembre dans la revue américaine Preventive Medicine Reports. Les chercheurs et médecins se sont intéressés aux répercussions du confinement de mars sur la population générale de Haute-garonne. L’étude a débuté miavril auprès de 536 personnes, âgées de 50 à 89 ans, qui avaient déjà participé à une précédente étude sur les facteurs de risque cardiovasculaire. Les patients, qui avaient déjà été examinés une fois par un médecin, ont répondu par téléphone à un questionnaire d’une heure sur les conséquences du confinement sur leur humeur, leur forme physique, leur moral ou même l’état de leur couple. « Ce qui nous a frappés, c’est qu’ils avaient déjà des problèmes au bout de quarante-quatre jours de confinement strict, confie Jean Ferrières, cardiologue au CHU de Toulouse et directeur de l’équipe ARTERRE à l’inserm. Nous savions que les personnes allaient souffrir de cet enfermement mais pas aussi vite. Au bout d’un mois et demi, 63 % des patients ont eu une aggravation du risque cardiovasculaire et 32 % ont développé des symptômes anxio-dépressifs ou une dépression. » Les facteurs de risque cardiovasculaires ont été aggravés par la prise de poids liée à l’alimentation, l’absence d’exercice physique, « en particulier quand les patients vivaient en milieu urbain ». Niveau moral, celui d’un tiers des patients a donc été affecté. Ce chiffre est même multiplié par deux chez les femmes et les personnes se sentant isolées socialement, par sept pour les patients souffrant auparavant de troubles de l’anxiété. Ce stress a aussi eu des effets sur les patients dont les relations de couple se sont détériorées.
L’impact du travail
Selon l’environnement et le statut socioprofessionnel, le confinement a été vécu différemment. Les participants qui ont continué à travailler, que ce soit à la maison (en télétravail) ou en présentiel avec un contact avec le public, ont aussi développé plus de risque de problèmes cardiovasculaires que ceux qui ont continué à travailler en présentiel sans contact avec le public. « Pour l’instant, nous n’avons pas fait de lien entre la santé mentale et l’aggravation du risque cardiovasculaire durant le confinement mais nous pensons que cet impact devrait être observé lors du suivi post-confinement, précise Jean Ferrières, dont l’étude va se poursuivre jusqu’en mars 2021. Avec ces premiers résultats, nous craignons qu’en cas de nouveau confinement dur, les conséquences sur la psychologie et le cardiovasculaire risquent d’être plus accentuées. »