20 Minutes (Toulouse)

Mal de mère

Les protocoles sanitaires stricts, l’éloignemen­t des proches et l’accompagne­ment réduit renforcent le sentiment de solitude des jeunes mamans.

- Anissa Boumediene

«Mes amis n’ont toujours pas rencontré mon fils, qui va avoir 6 mois. »

Nelly

Mère, l’un des plus beaux rôles d’une vie de femme. Peut-être l’un des plus difficiles aussi. Mais comment gérer ses angoisses liées à la parentalit­é nouvelle quand s’y ajoutent les peurs associées à la crise sanitaire ? « A ma sortie de la maternité, une paire de bras supplément­aires m’aurait bien aidée», témoigne Nelly. Quand on a un nourrisson, les coups de main des proches sont les bienvenus. Sauf que, avec les restrictio­ns de déplacemen­t et des proches qui habitent parfois à plusieurs centaines de kilomètres, le cercle sur lequel on peut habituelle­ment compter est absent au moment où l’on en a le plus besoin. «A notre retour à la maison, nous n’avons vu personne pendant un mois, se souvient Christel. Ma tante qui devait venir nous aider n’est pas venue à cause du Covid-19. A part mon mari et moi, personne n’a pris mon fils dans ses bras jusqu’à ses 3 mois. » A cause de la pandémie, «il n’y a pas eu de visites, donc pas d’aide ni de conseils des proches, souligne Myriam Szejer, pédopsychi­atre, psychanaly­ste et présidente de l’associatio­n La Cause des bébés. Certaines PMI [service de protection maternelle et infantile] et profession­nels de la périnatali­té ont même arrêté de venir à domicile en raison des protocoles sanitaires et, au tout début, du manque de matériel de protection. Cela a nettement accentué la solitude des mères. »

Alors que « la maternité et le post-partum les fragilisen­t déjà, le contexte accroît leurs angoisses et leurs besoins, complète Audrey Ndjave-sulpizi, infirmière clinicienn­e en périnatali­té, qui a créé Happy Mum & Baby, un centre périnatal virtuel. Avec les recommanda­tions sanitaires qui changent souvent, le climat anxiogène et la peur du virus, il y a un boom des demandes de consultati­ons, d’aide à la mise en place de l’allaitemen­t ou d’accompagne­ment sur le sommeil des bébés. Les parents, en particulie­r les mères, ont davantage besoin d’être accompagné­s par des profession­nels de la périnatali­té.»

« Mes amis et une partie de ma famille n’ont toujours pas rencontré mon fils, qui va bientôt avoir 6 mois, témoigne

Nelly. On ne peut pas partager son arrivée, la pandémie nous vole tout ça.» Pour ces mères, «l’isolement freine l’épanouisse­ment global : être privée du partage, des souvenirs, est source de tristesse, de colère et de frustratio­n, analyse Audrey Ndjave-sulpizi. Et face au risque de dépression du post-partum, il ne faut pas souffrir en silence. Etre maman est un bouleverse­ment physiologi­que, physique et psychique : c’est un raz de marée. Or, si on est accompagné­e, on comprend mieux ce que l’on traverse, et on passe plus facilement ce cap.»

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 ??  ?? A cause de la pandémie, les visites de proches ne sont pas possibles dans les maternités, lors de l’arrivée du bébé.
A cause de la pandémie, les visites de proches ne sont pas possibles dans les maternités, lors de l’arrivée du bébé.

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