Des malvoyants vivent dans le flou
Gaines électriques apparentes, fuites d’eau, rats... Au sein du centre national d’ophtalmologie des Quinze-Vingts (12e), la résidence Saint-Louis n’en finit pas de se décomposer. Au point d’en devenir « dangereuse » pour près de 200 personnes, en majorité aveugles ou malvoyantes, qui y habitent. « Actuellement, ils changent les vielles baignoires de certains appartements parce que de nombreuses personnes âgées sont tombées », indique Martine Fougeray-Caboch, la porte-parole des résidents. Elle alerte aussi sur un malaise globalisé qui a débouché, selon elle, « depuis 2013, sur quatre suicides par défenestration ». Aux origines de cette situation : « Un phénomène d’isolement avec un stress supplémentaire face à des loyers qui augmentent chaque année », avance Jean-Claude Mion, le représentant des locataires de la résidence nommé par l’association Consommation logement et cadre de vie (CLCV). Il y a quelques mois, la direction de l’hôpital a en effet annoncé une augmentation des charges de 10 %, finalement rabaissée à 3 % pour l’année 2017. Mais 500 € charges comprises pour un 28 m2, c’est encore trop pour des résidents dont la plupart vivent avec les minima sociaux.
Spéculation immobilière
De plus, « il y a un flou sur notre statut, insiste Martine Fougeray-Caboch. Nous n’avons pas de bail. Nous avons juste une “décision d’admission” délivrée par la direction des Quinze-Vingts. » « En contrepartie », la personne donne un dépôt de garantie et « une redevance mensuelle déterminée chaque année lors de l’établissement du budget », selon le règlement intérieur que 20 Minutes a pu consulter. Reconductible tous les trois ans, cette autorisation peut se perdre par simple décision de « nonreconduction d’attribution du logement », stipule ce même document. « On peut nous mettre dehors à tout moment », résume Jean-Claude Mion. « Je suis pour qu’une loi recadre ce type d’hébergement et que ses résidents soient pris en charge par la Sécurité sociale », souligne Nicolas Bonnet-Ouladj, président du groupe communistes Front de gauche au Conseil de Paris. Membre du conseil de surveillance des Quinze-Vingts, il s’interroge sur une éventuelle « tentative de faire partir les gens pour récupérer les appartements et en faire autre chose » dans un arrondissement touché par la spéculation immobilière. « Avec le montant des redevances, nous avons du mal à faire face », argue Marie-Thérèse Falais, directrice adjointe des Quinze-Vingts, pour justifier l’augmentation des charges d’un bâtiment qui dispose déjà de prestations d’hygiène, de travaux et de suivis médicaux. Mais elle le promet : tous les habitants resteront à Saint-Louis.