20 Minutes

Gérard Depardieu, du 7e au 8e art

Le monstre du cinéma est un personnage, pour le public et pour le dessinateu­r Mathieu Sapin

- Olivier Mimran

Dans Gérard. Cinq années dans les pattes de Depardieu, l’auteur de BD – qui s’était prêté au même exercice, avec François Hollande dans Campagne présidenti­elle (en 2012) et Le Château (2015) – révèle le comédien sous un jour inédit. Azerbaïdja­n, Bavière, Portugal… Mathieu Sapin a suivi Gérard Depardieu lors de différents tournages et voyages. Et confirme que les gens adorent notre colosse national, qui le leur rend bien : « Gérard est beaucoup dans l’altérité. Il a l’habitude d’être au centre des attentions, mais observe aussi énormément les autres. Ce qui lui plaît, c’est la rencontre humaine. Il peut alors aussi bien être séduit par Poutine que par un pêcheur portugais. » Le dessinateu­r voulait également « raconter ce paradoxe : cet homme est en quelque sorte en désamour avec la France et en même temps, il EST la France ! Il parle super mal l’anglais, il aime la bouffe… tu ne peux pas faire plus français que lui dans l’imaginaire étranger. »

La belle vie, la mort

Dans la scène d’ouverture, Gérard Depardieu reçoit l’auteur de BD dans sa villa parisienne. Son salon est rempli d’oeuvres de Claudel, Redon, Zadkine, Brancusi… Et on assiste, plus tard, à une vente privée au cours de laquelle on perçoit, à travers son dialogue avec des galeristes, sa profonde connaissan­ce de l’art. Au fil de l’album, Depardieu cite de nombreux auteurs. Et toujours à très bon escient. « Sa culture est énorme, affirme Mathieu Sapin. Et il l’a bâtie en lisant énormément – il regarde très peu la télé et déteste Internet. Mais il la doit aussi aux rôles qu’il a interprété­s : il est, par exemple, incollable sur la Révolution française depuis qu’il a joué Danton. » Depardieu se confie à Mathieu Sapin (qui n’en revient toujours pas!), dans le prologue – « Je ne pense pas à la mort avec tristesse. Je peux mourir demain, ça n’est pas grave » – puis dans l’épilogue – « J’ai toujours dit que je tiendrais encore sept ou huit ans, mais là je ne sais pas. Hier, ça n’allait pas trop. C’est surtout la nuit. J’en avais rien à foutre de la mort et depuis quelque temps, ça me fout le trac. » La scène montre un Depardieu fragile. « Il a une personnali­té paradoxale, très complexe, confirme Mathieu Sapin. Finalement, Gérard, c’est un bonhomme tout simple, qui compose au jour le jour avec ses petits bonheurs et ses grosses angoisses. » Gérard. Cinq années dans les pattes de Depardieu, de Mathieu Sapin. Dargaud, 19,99 €.

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Une rencontre déroutante, pleine d’humanité, d’art et de philosophi­e.

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